Logement
social : comment cacher la misère
Publié le
24/04/2024
Fort de
sa loi antisquatteurs, le ministre délégué au Logement, Guillaume Kasbarian, va
présenter d’ici peu un projet de loi, notamment contre le « logement à vie »,
censé régler le problème des 2,6 millions de ménages de travailleurs en
attente d’un logement social.
Montrés
du doigt, les « profiteurs » seraient les occupants qui dépassent les plafonds
de ressources et s’incrusteraient dans leur HLM, empêchant les demandeurs d’y
avoir accès. Encore une fois, ce gouvernement antiouvrier, loin de vouloir
corriger les défaillances du système, s’attaque aux travailleurs qui en sont
victimes. Après les chômeurs, les parents, ce sont les locataires des logements
sociaux qui sont dans la cible, désignés comme responsables de la dégradation
de la situation du logement.
En
réalité, les organismes bailleurs exercent eux-mêmes un contrôle annuel et
appliquent des surloyers lorsque les locataires dépassent de 20 % les plafonds
de ressources. D’après leurs fédérations, 3 % seulement de ceux-ci les
dépasseraient de 150 %, leur relogement étant alors programmé dans un parc
intermédiaire. Alors que plus d’un tiers des habitants des HLM sont sous le
seuil de pauvreté, le mythe du « logement à vie » agité par Kasbarian n’est
qu’un « effet d’estrade », comme le dit à juste titre une ancienne ministre,
pour mieux dissimuler le caractère réactionnaire du nouveau projet de loi.
Dans la
même veine qu’Attal prétendant « prendre des mesures fortes pour inciter à
construire davantage », ce projet permettrait aux maires de communes riches
ayant un déficit de logements sociaux d’intégrer dans leur quota les logements
à loyers intermédiaires (les LLI), deux fois plus chers au m², alors que ce
sont justement les logements très sociaux (PLAI) qui sont demandés par 70 % des
ménages en attente.
Autre
macroniste se mêlant du logement des travailleurs, le député Amiel voit comme
solution aux sous-effectifs dans les services publics de donner la priorité aux
fonctionnaires de « première ligne », que sont selon lui les infirmières, les
enseignants… et les policiers qui trouvent difficilement un logement proche de
leur lieu de travail. Au lieu de proposer d’augmenter les rémunérations à un
niveau qui leur permette de se loger, Amiel et ses inspirateurs ne proposent
que de pousser à la rue d’autres travailleurs !
Le pompon
revient encore une fois à Jordan Bardella qui, loin de proposer de construire
ou réhabiliter d’urgence les 500 000 logements qui manquent au bas mot, suggère
de vérifier la « carte d’identité française » des demandeurs. Sans crainte du
ridicule, il a même inventé le concept imbécile de « préférence étrangère » qu’il
accuse des municipalités de gauche d’appliquer sur leur territoire… À croire
que les bailleurs des cités de Marseille-Nord ou de Grigny-la Grande Borne y
accueilleraient de nombreux milliardaires américains ou émirs du Golfe.
Viviane Lafont (Lutte ouvrière
n°2908)