La grève
aussi forte qu’au début
Le succès de la « journée sans
cheminots » du 14 mai a infligé un camouflet à la direction de la SNCF et aux médias,
qui intoxiquaient l’opinion depuis plusieurs semaines sur « l’essoufflement »
du mouvement de grève entamé le 3 avril par périodes de 48 heures tous les cinq
jours.
La grève massive a été une
mauvaise surprise pour la direction de la SNCF, obligée de reconnaître un «
sursaut de mobilisation » : elle n’annonçait qu’un Transilien, un TER et un TGV
sur trois et un seul Intercités sur cinq. Le journal Capital, qui avait
fini par croire à ses propres mensonges, a parlé de coup de théâtre.
D’après les chiffres de la
direction, 74,4 % des conducteurs étaient en grève, autant qu’au début du
mouvement. Chez les contrôleurs, le taux de grévistes est même passé de 69 % le
premier jour à 74 % le 14 mai.
À l’échelle nationale, plus de 40
% du personnel d’exécution était en grève, soit presque autant que le 3 avril.
Dans certaines régions, comme le Limousin, les deux tiers des cheminots de
l’exécution étaient en grève, mais aussi près de la moitié des agents de
maîtrise et un cadre sur quatre.
Les piquets de grève ont été
particulièrement fournis dans beaucoup d’ateliers et de dépôts, montrant la
volonté des grévistes d’assurer par leur présence la réussite de la journée.
Les assemblées générales
marquaient partout une remontée du nombre de participants. Ils étaient plus de
300 à Nantes, 330 à Rennes, entre 150 et 200 dans les gares parisiennes. De
nouvelles têtes sont apparues dans de nombreuses assemblées.
Dans la guerre de tranchées entre
le gouvernement et les cheminots, le front de la grève n’a pas reculé. Il est
solide, alors que des dizaines de milliers de cheminots comptabilisent jusqu’à
18 jours de grève. Et si une fraction ne fait pas tous les jours de grève du «
calendrier », elle est toujours partie prenante du mouvement et prête à se
mobiliser. Il n’y a aucune défection ni dans les rangs, ni dans les têtes. Il y
au contraire la conscience que l’avenir de tous est en jeu et qu’il faut tenir
bon.
En plus de manifestations et
rassemblements, le 14 mai a aussi été marqué par le lancement, par
l’intersyndicale, du Vot’action, organisé jusqu’au 21 mai, proposant à
l’ensemble des cheminots de répondre « pour ou contre le pacte ferroviaire ».
Selon la fédération CGT, le 14 mai, « les militants CGT ont ouvert 519
bureaux de vote fixes et mobiles sur l’ensemble des sites ferroviaires ».
Dans les assemblées, où le lancement du vote a été présenté, il s’agissait de
répondre à l’argument de la direction SNCF, qui a osé prétendre que 80 % des
cheminots soutenaient la réforme. Cela est apparu, dans de nombreux endroits, comme
un moyen supplémentaire de montrer l’opposition des cheminots à ce plan.
Mais, les cheminots en sont bien
sûr convaincus, c’est la grève et elle seule qui pourra faire reculer le
gouvernement.
Partout les assemblées ont
reconduit la grève pour les 18 et 19 mai. Dans bon nombre de secteurs, les
grévistes se prononçaient aussi pour la participation aux manifestations du 22
mai avec la fonction publique.
Le gouvernement peut afficher sa
fermeté. Mais, nullement impressionnés, les grévistes sont toujours aussi
déterminés.
Christian
BERNAC (Lutte ouvrière n°2598)