Reconstruire
un parti de classe
Quoi qu’en disent ceux qui
veulent ravaler la fête de l’Humanité au rang de simple festival de musique,
elle reste, comme on l’a vu ce week-end, le plus grand rassemblement populaire
et militant du pays. Cette fête ne pourrait en effet pas se tenir sans le dévouement
bénévole de milliers de militants et de sympathisants du Parti communiste. Et
elle reste un rendez-vous important pour ceux des travailleurs qui veulent
discuter de la situation politique et aspirent à changer le monde.
Mais si
l’on s’en tient aux discours des dirigeants du PCF, changer le monde restera un
rêve car il n’y a plus rien dans leur politique qui permette de comprendre la
société capitaliste, sa division en classes sociales et la lutte fondamentale
que les travailleurs ont à mener pour le pouvoir politique. C’est aussi en vain
que les travailleurs chercheront auprès du PCF une politique représentant leurs
intérêts immédiats. Ce n’est d’ailleurs plus le cas depuis longtemps.
Comme son
nom le rappelle, le Parti communiste est né dans la foulée de la révolution
russe pour reprendre à son compte la perspective du renversement de la
bourgeoisie et de son ordre social. Mais le stalinisme est passé par là et le
PCF, devenu stalinien pour toute une période, a dévoyé les idées
révolutionnaires et véhiculé contre toute la tradition communiste les idées
nationalistes et les illusions électoralistes dans la classe ouvrière.
Pendant
la Résistance, le PCF a usé du crédit qu’il avait dans les classes populaires
pour soutenir le général réactionnaire De Gaulle. Puis, à la Libération, il a
mis tous ses efforts pour restaurer l’État bourgeois et remettre en selle le
grand patronat français. S’il était question de libération, ce n’était pas pour
le monde du travail ! Le PCF en fut récompensé par quelques postes de
ministre, mais dès qu’il n’y eut plus de danger révolutionnaire du côté des
travailleurs, il fut renvoyé dans l’opposition.
Le fait
d’être resté des décennies dans l’opposition, ses liens avec la classe ouvrière
et ses luttes ont permis au PCF de conserver un vernis « lutte de
classe ». Mais, aujourd’hui, l’électoralisme est devenu la raison d’être
de l’activité militante du PCF. Comme ça l’est pour n’importe quel parti de la
bourgeoisie, son horizon se borne aux échéances électorales, quand bien même il
est de plus en plus évident aux yeux des classes populaires que les élections
ne changent pas leur vie.
Toute la
vie politique montre que les institutions et la démocratie bourgeoises ne sont
que des paravents qui masquent le pouvoir du capital. Que les élections et le
jeu de l’alternance ne sont qu’un grand cirque destiné à lanterner les
travailleurs. Et tout ce que le PCF a à proposer à ses militants se limite à
participer à ce cirque !
Pour cela
il est prêt, comme il l’a fait dans le passé, à s’acoquiner avec des
politiciens étrangers à la classe ouvrière. En ce moment, le PCF défend l’idée
d’un rassemblement de la gauche anti-austérité en s’adressant à Mélenchon, aux
frondeurs du PS, aux écologistes et à Montebourg. Mais quand bien même ils parviendraient
à s’unir, ce qui est encore loin d’être le cas, où cela nous mènerait-il ?
À ce qui
s’est passé en Grèce avec Syriza ? À ce que cette nouvelle équipe fasse
mine de découvrir, une fois au pouvoir, que ce sont les banquiers et la grande
bourgeoisie qui décident parce qu’ils détiennent la réalité du pouvoir ? À
ce qu’ils se retrouvent, comme Tsipras, forcés de renier leurs promesses
électorales en démoralisant une fois de plus ceux qui leur avaient fait
confiance ?
Ce n’est
pas d’illusions dont les travailleurs ont besoin, mais de la conscience de
leurs intérêts de classe. Pour cela, ils ont besoin d’un parti et de militants
qui se placent sur le terrain de classe, comme les militants du Parti
communiste l’avaient fait lors de sa fondation.
Un parti
ouvrier et des militants qui ne se laissent pas prendre au piège de faux débats
sur l’euro ou la souveraineté nationale quand le problème fondamental est le
pouvoir d’une poignée de capitalistes sur la société. Un parti et des militants
qui expliquent que le fonctionnement normal du capital est d’être impitoyable
et qu’il n’y aura pas d’arrangement ni de négociation possible avec la
bourgeoisie. Un parti et des militants qui affirmeront inlassablement que seule
la force de la classe ouvrière mobilisée peut faire reculer la bourgeoisie.
Pour
mettre fin au désarroi politique qui fait le lit du FN dans les classes
populaires, il faut reconstruire un parti qui représente les intérêts des
travailleurs et réaffirme la perspective historique dont ils sont porteurs :
celle d’une société débarrassée de la propriété privée des entreprises et de
l’exploitation de l’homme par l’homme.