samedi 4 novembre 2017

Révolution russe de 1917 (40) : après octobre, faire face à la contre-révolution


Les débuts du pouvoir soviétique : face à la contre-révolution :

Dès la fin octobre, le nouveau pouvoir doit affronter la contre-révolution regroupant dans un comité de salut public tous les ennemis du bolchevisme, des tsaristes aux socialistes-révolutionnaires de droite et aux mencheviks. Victor Serge, militant bolchevik, raconte dans son ouvrage L’an I de la révolution russe, écrit dix ans après les évènements, l’âpreté des combats à Moscou.
« La bataille de rue dura six jours et fut sévère. L’initiative des opérations appartint au comité de salut public qui le 27 octobre (…) sommait le comité révolutionnaire militaire (CRM) [de Moscou] de se dissoudre, dans un quart d’heure. (…)
Le 28, à minuit, les junkers – élèves des écoles militaires – cernent le Kremlin. Déjà le comité de salut public occupe les gares, l’usine électrique, la station centrale des téléphones. Coupé du CRM, le commandant du Kremlin (…) rend la place, sur promesse formelle que ses hommes auront la vie sauve. Il va lui-même ouvrir les portes. Il est aussitôt empoigné, frappé, abreuvé d’outrages par les junkers. Un colonel lui dit : « Tiens ! Vous êtes encore vivant ? Il faut vous tuer. » Les ouvriers de l’arsenal du Kremlin n’apprennent la capitulation que lorsqu’on vient arrêter leur comité de fabrique. (…) Le vacarme de trois mitrailleuses en action se mêle à des cris d’épouvante, à des râles, à des sanglots. (…) Ce massacre n’est pas un fait isolé. Les blancs arrêtaient et fusillaient un peu partout. (…) La terreur blanche débutait. »

L’offensive avortée du général Krasnov

« Kerenski s’était réfugié parmi les cosaques du général Krasnov. (…) Monarchiste ambitieux, destiné à devenir, dans la guerre civile, une des vedettes de la contre-révolution, Krasnov assura qu’ils materaient sans peine l’anarchie installée à Petrograd. Dans la capitale même, le soulèvement militaire préparé par les socialistes-révolutionnaires ne devait-il pas leur aplanir les voies ? [Les cosaques] occupèrent Gatchina et Tsarkoïe-Selo, à moins de vingt kilomètres de la capitale. Les hauteurs de Poulkovo s’élevaient maintenant entre eux et Petrograd. L’artillerie lourde leur infligea du haut de ces collines des pertes sévères (300 à 500 morts, 30 octobre). Les cosaques, surpris par cette résistance, démoralisés par l’agitation, environnés de l’hostilité des populations ouvrières, reculèrent en désordre. (…) [Kerenski] n’eut, cette fois encore, que le temps de filer, au moment où Krasnov, son subordonné – qui le méprisait – se préparait à le livrer aux bolcheviks, « afin de voir s’il n’était pas un lâche ». Krasnov lui-même fut, en somme, livré par ses cosaques. (…) La révolution eut le tort de se montrer magnanime à l’égard du chef de la division cosaque. Il eût fallu le fusiller sur l’heure. Il recouvra, au bout de quelques jours, la liberté sur parole d’honneur de ne plus porter les armes contre la révolution. Mais est-il des engagements d’honneur envers les ennemis de la patrie et de la propriété ? Il alla mettre la région du Don à feu et à sang. »
« Aux Affaires étrangères, Trotsky [nommé commissaire du peuple à ce poste] ne trouva personne. Un prince Tatischeff, mis en état d’arrestation, consentit à la fin à lui ouvrir les secrétaires. Le commissariat des Affaires étrangères fonctionnait à Smolny, sans installation ni personnel. Trotsky, d’ailleurs absorbé par les tâches militaires, se faisait à ce moment, de la politique étrangère, une idée sommaire : « Ma mission est restreinte : publier les traités secrets et fermer boutique. »

L’appel de Lénine à l’initiative des masses

Pour défendre la révolution, Lénine s’adressait aux soldats, aux ouvriers et aux paysans. Le 22 novembre, au premier congrès de la marine de guerre de Russie : « Les masses ont pris conscience de leurs forces et, sans se laisser troubler par les persécutions de la bourgeoisie, ont commencé à gérer elles-mêmes l’État. Au début, des difficultés peuvent surgir, une préparation insuffisante peut se faire sentir. Mais il faut apprendre pratiquement à administrer le pays, se rendre maître de ce qui était naguère le monopole de la bourgeoisie. »
Le 4 novembre, aux ouvriers du soviet de Pétrograd : « La masse ouvrière doit organiser le contrôle et la production sur une vaste échelle nationale. C’est dans l’organisation de la masse laborieuse, et non d’un certain nombre d’individus, que réside le gage du succès. »
Le 6 décembre, aux paysans, lors du IIe congrès des soviets des députés paysans de Russie : « Camarades paysans ! Méditez notre message, notre appel lancé par les députés des paysans aux paysans de toutes les nations de la Russie, lisez notre appel dans chaque village, dans chaque isba, examinez-le à toutes les réunions, à toutes les assemblées, dans toutes les institutions rurales sans exception, prenez vous-mêmes sur place des décisions fermes, inébranlables. Car c’est avant tout de vos décisions, des décisions de la majorité du peuple, des décisions des paysans eux-mêmes, que dépend le sort de notre patrie. »

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