Loi
travail : face aux exigences du patronat, imposer celles des travailleurs
Jeudi 27 juillet, le Sénat
devrait avoir voté la loi d’habilitation qui autorise le gouvernement à publier
le 21 septembre les ordonnances qui modifieront de façon radicale le Code du
travail.
La ministre du Travail, Muriel
Penicaud, a tenu à repréciser que le gouvernement veut mettre fin au « droit
du travail (…) conçu sur un modèle qui est celui de l’emploi à vie dans une
grande entreprise industrielle ». Il faut toute la suffisance d’un
serviteur du patronat pour oser sortir de telles énormités. Les patrons n’ont
pas attendu Macron et ses ordonnances pour illustrer ce que signifie pour eux «
l’emploi à vie » : jeter à la rue et transformer en chômeurs près de six
millions de travailleurs, alors que la fortune des plus riches capitalistes a
été multipliée par dix en 20 ans. À quoi il faut ajouter la précarité de
millions de salariés.
Quant aux prétendues entraves aux
licenciements, de quoi parle-t-on ? Il y a chaque année plus d’un million de
licenciements, dits « individuels » pour l’immense majorité. Cela montre le peu
d’obstacles auxquels se heurtent les patrons quand ils veulent se débarrasser
de leurs salariés. Sans oublier les ruptures du contrat de travail dites «
conventionnelles », qui permettent de se débarrasser d’un salarié sans
procédure ni risque de contestation, et qui pour le dernier semestre ont
dépassé les 200 000.
Le patronat veut revenir sur ce
qu’il avait dû concéder à l’ensemble de la classe ouvrière dans le passé. Comme
il a un sens aigu du rapport de force, il pense que le chômage de masse,
l’absence de réactions massives et radicales du monde du travail dans la
dernière période, peuvent lui permettre d’y arriver. Et la loi préparée par le
gouvernement vise à l’aider.
Pour faire reculer la condition
ouvrière, les patrons comptent sur ce qu’ils appellent le dialogue social. Et
bon nombre de commentateurs ou même de dirigeants syndicalistes marchent dans la
combine. Négocier dans ces conditions signifie négocier des reculs pour
l’ensemble des travailleurs, car c’est négocier sur les revendications du
patronat. Or, négocier un recul, et le qualifier d’avancée, est pire que de se
le voir imposer. C’est encore plus démoralisant, car c’est accepter de
considérer comme nécessaire la détérioration de son salaire, de ses conditions
de vie et de travail.
Les attaques contenues dans la
future loi travail font partie de cette offensive générale entreprise par le
patronat. Il est nécessaire de se préparer à y riposter efficacement. Le piège
est de prétendre « être réaliste » en se contentant, comme certains, de vouloir
simplement essayer de minorer les effets des ordonnances. Par exemple en se
satisfaisant du fait que les reculs voulus par le patronat soient négociés au
niveau de la branche au lieu de l’être au niveau de l’entreprise. Mais un
recul, qu’il soit négocié au niveau de la branche ou de l’entreprise, une fois
conclu, reste un recul pour les salariés. C’est le cas, par exemple, du dernier
accord de branche des 150 000 salariés de l’habillement qui autorise désormais
tous les patrons à imposer le travail du dimanche.
Comme le patronat et le
gouvernement le montrent, tout dépend du rapport de force entre le monde du
travail d’une part, les capitalistes et leur gouvernement d’autre part. C’est
bien pourquoi seule la mobilisation des travailleurs, les 30 millions de
salariés, fixes, précaires, privés d’emploi ou agents des services publics,
sera capable d’inverser le cours des choses, le jour où ils se mettront en
mouvement pour leurs propres intérêts. Pour en finir avec des années et des
années de reculs et d’attaques patronales, il faut remettre en avant les
exigences du monde du travail.
Paul SOREL (Lutte ouvrière n°2556)
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