Lutte
ouvrière dans les élections européennes (4) La suite de l’article de notre
revue Lutte de classe de mars-avril 2019 sur papier ((2,5 euros) ou :
https://mensuel.lutte-ouvriere.org//2019/03/09/lutte-ouvriere-dans-les-elections-europeennes_117795.html
Bloquer l’économie, ou la faire fonctionner dans l’intérêt collectif ?
Ce qui a le plus enthousiasmé les
médias bourgeois dans le mouvement des gilets jaunes à ses débuts, c’est le « caractère original » des blocages de ronds-points qui ont
perturbé la vie économique et ont rendu le mouvement plus visible. Mais cela en
a aussi gelé les limites, étroites.
La perspective politique de la
classe ouvrière n’est pas de bloquer la vie économique. Elle est de la réorganiser,
de la faire fonctionner autrement. Elle est d’enlever à la grande bourgeoisie
la propriété des grands moyens de production et le commandement de toute la vie
économique.
De cette différence de
perspective découlent les différences pour ce qui est des réponses à toutes les
questions soulevées à l’intérieur du mouvement des gilets jaunes.
La question du pouvoir d’achat
pour commencer. Elle a été commune à diverses catégories populaires. Les
travailleurs de petites entreprises, les retraités, les chômeurs – la couche la
plus dispersée, la plus écrasée de la classe ouvrière – en constituaient la
majorité.
Pour la classe ouvrière, derrière
la question du pouvoir d’achat, il y a pour, paraphraser Trotsky (le
Programme de Transition), les « deux maux
économiques fondamentaux dans
lesquels se résume l’absurdité du système capitaliste, à savoir le chômage et
la cherté de la vie ».
La transformation d’un nombre
croissant de travailleurs en chômeurs réduits à la charité publique est une
catastrophe pour l’ensemble de la société. Aujourd’hui comme au temps de
Trotsky, le seul objectif qui vaille face à cette catastrophe est la
répartition du travail existant entre tous les travailleurs, sans diminution de
salaire. La durée de la semaine de travail doit être déterminée en fonction de
cette répartition.
Pour défendre le pouvoir d’achat
des salariés et des retraités contre le renchérissement de la vie dû aux
hausses des prix aggravées par les prélèvements étatiques, le seul objectif qui
vaille est l’augmentation des salaires et des retraites et leur indexation
automatique sur les prix.
En exprimant la volonté légitime
de mieux contrôler ce que l’État fait de l’argent de nos impôts, le mouvement
des gilets jaunes a également soulevé, quoique de façon limitée, extrêmement
confuse et ambiguë, la question du monopole des décisions par les prétendues
élites. Pour l’essentiel, la réponse sur laquelle s’est retrouvée la
quasi-totalité du mouvement a été : « Macron démission ! » S’y est
ajouté par la suite le référendum d’initiative citoyenne.
Les élites du pouvoir étatique,
si bien incarnées en la personne de Macron et son mépris de classe, ne sont
cependant pas suspendues en l’air. Même les hommes d’État qui ne sont pas issus
de la grande bourgeoisie ont été formés, dressés, pour servir ceux qui
monopolisent les capitaux, le véritable pouvoir dans la société. S’en prendre à
la classe capitaliste n’était pas dans les objectifs du mouvement des gilets
jaunes, si ce n’est sous la forme innocente de dénoncer l’injustice de certaines
mesures symboliques comme la suppression de l’ISF.
La transparence sur le comment et
le pourquoi des décisions est une préoccupation légitime que seuls les
travailleurs peuvent pousser jusqu’au bout, en la traduisant en fonction de
leurs intérêts de classe.Le remplacement du chef de l’État en place par un
autre, ou un référendum, fût-il « citoyen » ou « populaire », offrent une fausse solution à un vrai problème. La
question de fond, confusément posée par les gilets jaunes, est : qui
contrôle et dans l’intérêt de qui ?
La réponse ne peut pas se limiter
à la transparence du fonctionnement de l’État. Elle doit viser, autant et plus,
les entreprises capitalistes sur lesquelles repose le fonctionnement de
l’économie et de la société.
La transparence dans la gestion
des entreprises ne peut être réalisée que par la suppression du secret
industriel et commercial et par le contrôle ouvrier sur les entreprises.
La classe ouvrière dans son
ensemble et dans toute sa diversité est la seule à pouvoir réaliser le contrôle
de la vie économique.
Même la classe capitaliste ne
contrôle, n'encadre et ne maîtrise l’économie que par l’intermédiaire de
salariés. Dans les entreprises, pour en assurer le fonctionnement, dans les
banques et les compagnies d’assurances, et jusque dans les officines
spéculatives, la grande bourgeoisie passe par l’intermédiaire de toute une
hiérarchie de salariés, jusqu’aux employés les plus mal payés.
Ensemble et organisés,
c’est-à-dire liés entre eux, guidés par la conscience de classe et un programme,
ces employés n’auraient aucun mal à exercer le contrôle ; cette
fois, non pas dans l’intérêt d’une classe de parasites, mais dans leur
propre intérêt et dans l’intérêt des
classes laborieuses. Ensemble, ils ont les moyens de mettre le doigt non seulement
sur toutes les magouilles particulières, sur tous les détournements individuels
dont l’actualité est pleine, mais aussi de mettre au jour l’appropriation de
l’ensemble de l’économie par le seul grand capital et le détournement des
forces de production collectives au profit d’une minorité de parasites.
En agissant en tant que classe,
en dépassant les intérêts locaux ou corporatifs, les travailleurs en lutte
franchiront, à travers le contrôle, les premiers pas vers la réorganisation
complète de l’économie, pour arracher les moyens de production à leurs
propriétaires parasites, pour donner du travail à tous et le répartir
équitablement. Le vieux mot d’ordre des classes laborieuses, « faire
payer les riches »,
prendrait enfin sa signification.
(A
suivre)
Demain
lundi 18 mars
À 11h00
BFMTV :
Interview de Nathalie Arthaud
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