Accueil
des migrants : les ambiguïtés de Mélenchon
À l’initiative des rédactions de
Médiapart, Politis et Regards, un manifeste pour l’accueil des
migrants circule sur Internet et a déjà été signé par de nombreuses personnes,
dont des personnalités du monde du spectacle, des écrivains, des militants
politiques, dont nos camarades Arlette Laguiller et Nathalie Arthaud.
Le manifeste dénonce la montée de
l’extrême droite en Europe et la généralisation des discours politiques faisant
des migrants les responsables de tous les méfaits engendrés par la crise du
capitalisme. Les auteurs du texte s’opposent à la fermeture de plus en plus
hermétique des frontières, à une politique toujours plus répressive à
l’encontre des migrants. Ils revendiquent à juste titre la liberté de
circulation et l’égalité d’accès aux droits sociaux dans les pays d’arrivée.
La signature du manifeste par
d’anciens ministres ou des responsables de partis ayant soutenu des
gouvernements dont la politique a conduit à la situation actuelle n’est bien
sûr pas dénuée d’arrière-pensées. Certains, à la veille de nouvelles échéances
électorales, cherchent à se refaire une virginité humaniste avec les migrants,
dont ils justifiaient parfois les expulsions hier. Mais le refus de signer le
manifeste par Mélenchon montre aussi toute l’ambiguïté volontaire que le leader
de la France insoumise entretient sur la question.
En réponse à des journalistes de
France 3 qui lui demandaient dimanche 30 septembre de s’expliquer sur son refus
d’apporter sa signature au texte, il a prétendu y trouver « un petit
côté mondain ». Comme si l’accueil dans des conditions décentes de
tous ceux qui fuient la misère et la guerre après avoir franchi la Méditerranée
en risquant leur vie était une revendication étrangère au monde du travail.
Mélenchon préfère une nouvelle
fois ne pas heurter les sentiments xénophobes d’une partie de l’électorat, pour
ratisser large à la veille des élections européennes. Loin d’être un tournant,
cette attitude est dans la continuité de ses positions passées. En juillet
2016, il avait accusé les travailleurs détachés de « voler le pain des
travailleurs qui se trouvent sur place ». Bien sûr, Mélenchon est un
politicien suffisamment retors pour savoir dire tout et son contraire en
fonction du public auquel il s’adresse, parlant à l’occasion de régulariser une
partie des sans-papiers ou d’accueillir les quelques rescapés sauvés par l’Aquarius.
Mais cela ne l’empêche pas, au
travers de petites phrases, de reprendre à sa façon les préjugés distillés par
toute la classe politique à l’encontre des migrants. Lors de sa rentrée
politique à Marseille début septembre, il a ainsi réitéré son opposition à leur
liberté d’installation, parlant « des nombreux problèmes que poseraient
aux sociétés d’accueil (…) les vagues migratoires ».
Un responsable influent se
présentant comme un défenseur des classes populaires se montre ainsi
complaisant à l’égard d’idées xénophobes, qui désignent les migrants comme
responsables de l’aggravation du chômage, due au patronat, et de la réduction
des aides sociales, décidée par Macron et son gouvernement. Cela augure bien
mal de la politique qu’il pourrait mener si jamais il accédait au pouvoir.
Les travailleurs, d’où qu’ils
viennent, ont les mêmes intérêts. Leur force dans les luttes de demain dépendra
aussi de leur capacité à rejeter tout ce qui contribue à les diviser, selon les
lieux où ils sont nés et où ils ont vécu ou se sont retrouvés contraints à
s’installer pour vivre. En son temps Marx disait déjà en substance qu’un
travailleur est partout chez lui. Alors, vive la liberté de circulation et
d’installation pour tous !
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire