Une épreuve de force qui va au-delà de la loi El
Khomri
Malgré
le recours à l’article 49-3, le gouvernement n’en a pas fini avec la
contestation contre la loi El Khomri. Aux grèves et aux manifestations qui
rassemblent toujours plusieurs centaines de milliers de personnes, se sont
ajoutées différentes actions ? en particulier dans les raffineries. Cela
va des grèves qui conduisent à l’arrêt total de certaines raffineries au blocage
des zones industrielles et des dépôts de pétrole.
Les routiers, en pointe dans ces blocages, ont
d’ailleurs remporté une petite victoire sur le gouvernement puisqu’ils ont
obtenu l’assurance que la loi El Khomri n’entraînerait pas une baisse de la
rémunération de leurs heures supplémentaires.
Hollande et Valls multiplient peut-être les coups
de menton, mais cette concession montre qu’ils peuvent reculer face à la
mobilisation car ils la craignent.
Ils savent que l’opposition à leur politique est
massive et dépasse de loin les rangs de ceux qui agissent. Alors, tant qu’il y
aura de nouvelles actions et l’entrée dans le mouvement de nouveaux secteurs
avec du monde en grève et dans la rue, rien ne sera joué.
À la SNCF, les cheminots se sont lancés depuis
mercredi dernier dans un mouvement de grève contre un accord d’entreprise qui
augmentera l’amplitude des journées de travail, supprimera des temps de repos
et des jours de congés. Parallèlement à la loi El Khomri et dans le même
esprit, le gouvernement a en effet pris un décret pour dérèglementer
l’organisation du travail dans le ferroviaire. Comme tous les salariés, les
cheminots subissent désormais le chantage à la concurrence et à la
compétitivité.
C’est tous azimuts que le gouvernement et le
patronat attaquent. « Non à l’allongement du temps de travail »,
« non aux accords d’entreprise qui sacrifient les conditions de
travail ! », disent tous ceux qui se battent, et ils ont raison.
La mobilisation s’est cristallisée contre la loi
El Khomri, avec l’objectif concret du retrait de cette énième attaque
anti-ouvrière. Mais cette loi ne représente qu’une étape de plus dans
l’offensive générale du patronat contre les droits des travailleurs. C’est
pourquoi la contestation exprime un mécontentement bien plus large.
Derrière l’épreuve de force entre les opposants à
la loi El Khomri et le gouvernement, il y a l’épreuve de force entre les
travailleurs et le patronat. Il y a la lutte de classe.
Mais, désormais, une fraction des travailleurs ne
veut plus subir les coups patronaux et a décidé de riposter et de se défendre.
Des travailleurs dénoncent, s’opposent aux
attaques, ils s’organisent et se rassemblent pour défendre leurs intérêts,
c’est, d’ores et déjà, un des acquis importants de ce mouvement. Et cela change
l’état d’esprit de bien des travailleurs au-delà de ceux qui se
mobilisent.
Il apparaît désormais évident que le monde ouvrier
doit se battre tout autant sous un gouvernement de gauche que sous un
gouvernement de droite. Car loin de protéger les travailleurs, le gouvernement
socialiste travaille pour le patronat. Et quand bien même le PS camoufle sa
politique anti-ouvrière en parlant de justice sociale ou de dialogue social, il
est l’un de ses serviteurs les plus zélés et les plus résolus.
Il est clair qu’en matière de politique
anti-ouvrière, le gouvernement de gauche n’a rien à envier à la droite. Avec
son coup de force pour faire passer la loi El Khomri et le recours au 49-3 on
voit qu’Hollande et Valls valent aussi Sarkozy et Fillon en matière d’arrogance
et d’autoritarisme.
Le grand patronat ne s’arrêtera pas, que la loi El
Khomri passe ou pas. Il profitera du chômage, de la précarité, des divisions
qu’il attise dans le monde du travail et qui lui donnent une position de force,
pour faire reculer les travailleurs. Si les travailleurs le laissent faire, il
ira toujours plus loin dans l’intensification de l’exploitation.
Alors, tous ceux qui continuent de se battre pour
faire valoir les intérêts des travailleurs ont raison. La durée même de la
mobilisation, près de trois mois, montre leur détermination. Elle montre des
travailleurs décidés à ne plus se taire et à se défendre collectivement, par
eux-mêmes.
Leur lutte est juste, et ils peuvent être fiers
d’exprimer la colère du monde du travail. Ils peuvent être fiers de renforcer
la conscience du monde ouvrier et de montrer la seule voie pour inverser le
rapport de force avec le patronat et améliorer le sort des classes populaires.
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