Droit à l'avortement : le retour en arrière
« Un million de femmes se font avorter en France. Elles le font dans des conditions dangereuses en raison de la clandestinité à laquelle elles sont condamnées, alors que cette opération, pratiquée sous contrôle médical, est des plus simples. (...) Je déclare que je suis l'une d'elles. Je déclare avoir avorté. De même que nous réclamons le libre accès aux moyens anticonceptionnels, nous réclamons l'avortement libre. »
C'était
en 1971, le Manifeste des 343. Quatre ans plus tard, grâce au combat des
femmes, le droit à l'avortement était, enfin, inscrit dans la loi.
Mais
aujourd'hui, quarante ans plus tard, et c'est le très officiel « Haut
conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes » qui l'affirme dans un
rapport remis au gouvernement, le recours à l'interruption volontaire de
grossesse (IVG) reste pour bien des femmes « un véritable parcours de la
combattante ».
Le
rapport passe en revue les dysfonctionnements qui aboutissent dans certains cas
à faire d'une IVG un chemin semé d'obstacles. Il accuse le manque d'information
ou les difficultés d'accès à cette information, qui font par exemple que l'IVG
médicamenteuse reste peu pratiquée. Il incrimine la clause de conscience
invoquée par certains médecins ou gynécologues pour refuser de pratiquer des
avortements. Et puis, aussi et surtout, il dénonce le manque de moyens et de
personnels, et notamment la fermeture entre 2000 et 2011 de
130 établissements de santé pratiquant des IVG !
En
conséquence, des femmes connaissent l'angoisse de ne pas pouvoir être prises en
charge à temps. Certaines sont même contraintes, après avoir dépassé les délais
légaux et si elles en ont les moyens, d'aller avorter à l'étranger. Comme
autrefois, avant la loi. Parce que, pendant ces quarante ans, tous les
gouvernements qui se sont succédé n'ont eu de cesse de faire des économies sur
les budgets de la santé et de fermer des structures de santé, au prétexte
qu'elles n'étaient pas rentables. Et cela au mépris des droits des femmes, qui
ne les intéressent que les jours de discours ou d'inaugurations.
Remis
à la ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem, le présent rapport
affirme : « En faisant état des insuffisances du service public en
matière d'IVG (...) les rapports se suivent mais les obstacles
demeurent. » Certes, et il pourrait bien en être de même une fois encore.
Sophie
Gargan
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