La guerre
pour l’accès à l’eau, une guerre sociale
22
juillet 2024
Samedi
20 juillet, les chaînes de télévision ont montré 3 000 CRS attaquant au
pas de charge près de 10 000 manifestants rassemblés près du port de La
Rochelle pour dénoncer les méga-bassines.
Macron
et ses ministres venaient de subir une défaite électorale, c’est pourtant sous
le commandement du même ministre de l’Intérieur Darmanin que les policiers ont
asphyxié de gaz lacrymogènes et repoussé les manifestants. Darmanin s’est vanté
des interpellations en déclarant : « On
a du mal à voir le rapport avec la défense de l’environnement »,
confondant volontairement les black-blocs, venus en découdre avec la police,
avec la masse des manifestants. Mais il est le premier à cacher les causes réelles
du mécontentement et de l’intervention policière massive.
Le
ministre et les médias ont cherché à mettre en opposition des écologistes à des
paysans ayant besoin d’assurer l’apport en eau pour leurs cultures. Mais c’est
un mensonge. Dans le monde agricole, petits et gros ont des intérêts opposés.
Et du côté des manifestants, le matin même, des petits agriculteurs, soutenus
par la Confédération paysanne, ont déjoué le dispositif de la police pour
mettre en place, avec une dizaine de tracteurs, le « blocage paysan »
d’un site du groupe Soufflet, un des plus gros exportateurs de blé de France.
Car,
derrière le problème des méga-bassines, il y a celui de l’accaparement de l’eau
par les grandes exploitations céréalières. Comme l’a déclaré un agriculteur
participant au blocage : « Les
méga-bassines, c’est un système pour quelques privilégiés qui auront droit à
l’eau pour irriguer ».
Ces
manifestants ont ciblé le port de commerce de La Pallice à La Rochelle parce
que celui-ci est le deuxième port exportateur de céréales de France, après
celui de Rouen. Les plus gros spéculateurs, comme le groupe Soufflet, y
possèdent des silos géants. Ces financiers de l’agro-business exportent dans le
monde entier chaque année des millions de tonnes de céréales qu’ils collectent
dans la région environnante. Et ils ont cherché avec les méga-bassines à mettre
la main sur l’eau pour assurer l’irrigation des plus riches exploitations
céréalières qui leur sont liées, rendant l’accès à l’eau bien plus difficile
pour les petits paysans.
Les
jeunes qui se mobilisent sur la question des méga-bassines depuis plusieurs
années dénoncent, à juste raison, un système capitaliste prédateur qui détruit
la nature et les hommes. Et c’est contre tous ceux-là que les préfets de la
région et Darmanin ont mis les gros moyens pour soutenir les intérêts des gros
céréaliers.
Une
autre organisation paysanne, la Coordination rurale, très proche de l’extrême
droite, s’est opposée aux manifestants anti-bassines. Et cela montre justement
qu’elle est du côté des plus riches agriculteurs et de l’agrobusiness.
Dans
cette lutte, entre d’un côté les plus riches et de l’autre les plus petits
paysans, notre solidarité de travailleurs va aux plus petits qui ne cherchent
pas à accumuler des milliards mais défendent leur droit à vivre dignement de
leur travail. Et cette solidarité avec d’autres exploités rejoint la lutte
légitime que nous devons mener pour nos propres intérêts. La classe ouvrière
est la classe la plus exploitée de la société. Ce sont les travailleurs qui font
fonctionner les usines, les transports, les administrations, les services… La
crise économique continuant et s’aggravant, les travailleurs recevront en
priorité les coups du gouvernement et des capitalistes, comme les petits
paysans aujourd’hui.
Nous avons
la force de nous défendre ! Notre rôle dans l’économie est bien plus grand
que celui de n’importe quelle autre catégorie sociale. Si des millions de
travailleurs de tous secteurs se mettaient en grève ensemble, en occupant leurs
lieux de travail, ils représenteraient une force considérable. Ils seraient
capables de se faire craindre du grand patronat comme du gouvernement. Ils
pourraient représenter un espoir pour ceux que le capitalisme opprime,
c’est-à-dire l’immense majorité de la société.
La
conclusion à tirer est la nécessité et l’urgence que renaisse un parti ouvrier
communiste révolutionnaire, regroupant des travailleurs de toutes origines,
représentant leurs intérêts au quotidien et portant la perspective du
renversement du capitalisme. L’avenir de la société en dépend.
Nathalie Arthaud