C’est pas
à Matignon, ni au Palais-Bourbon, qu’on obtiendra satisfaction !
01 Février 2023
Le 30 janvier, les députés ont
démarré l’examen de la réforme des retraites présentée par Élisabeth Borne et
son gouvernement. Ministres et journalistes en concluent qu’il ne servirait
plus à rien de manifester. Il faudrait désormais s’en remettre à la «
représentation nationale ».
Après leur élection, en juin
dernier, dans le cadre d’un système électoral biaisé et avec un taux
d’abstention de 50 %, dire que les députés représentent le pays est plus
que discutable. Dire qu’ils auraient le droit depuis leur fauteuil d’imposer
aux salariés du pays de travailler plus longtemps l’est encore plus. Quant au
Parlement, il a tout d’un théâtre.
Plus de 7 000 amendements
ont certes été déposés par les groupes parlementaires. Certains visent à
empêcher le passage à 64 ans. D’autres, déposés y compris par des députés de la
majorité, cherchent à atténuer tel ou tel aspect particulièrement choquant du
projet pour mieux faire passer la pilule. Ces amendements concernent, par
exemple, les femmes ayant élevé des enfants, les régimes spéciaux de certains
travailleurs, les carrières longues ou les travaux pénibles, etc.
Pendant 50 jours, en commission
puis dans l’hémicycle, puis au Sénat, les parlementaires sont censés discuter
de tous ces amendements. Mais, la Constitution étant bien faite pour le
gouvernement, il peut utiliser le fameux article 49-3, qui lui permet de faire
passer sa loi en force, sauf si tous les députés opposants s’unissent pour le
faire tomber. Un autre article opportun, le 47-1, lui permet de raccourcir la
discussion et d’aller chercher un accord avec les sénateurs, majoritairement de
droite et favorables aux 64 ans, pour faire voter la loi.
Autant dire que, si les
travailleurs ne veulent pas travailler jusqu’à l’épuisement ou partir avec une
pension de misère, ils ne peuvent pas mettre leurs espoirs dans le Parlement
mais doivent compter sur leur mobilisation et en particulier sur la grève.
Macron n’est qu’un exécutant des exigences patronales. Si les travailleurs
menaçaient la production, c’est-à-dire la machine à profits du grand patronat,
ce dernier lui demanderait bien vite de remiser sa loi. Déjà, dans diverses
entreprises, de Carrefour à Airbus en passant par Stellantis, les travailleurs
ont pu noter un changement de ton de la hiérarchie. Des chefs prêts à faciliter
la participation à la manifestation du 19 janvier en accordant des congés, car « elle
ne vise pas l’entreprise », ne voulaient plus en entendre parler le
31.
La mise en œuvre d’une loi est
d’abord une question de rapport de force. On l’a vu en 2006 avec la loi qui
voulait instaurer le CPE, ce smic au rabais pour les jeunes. La mobilisation
massive de la jeunesse et la menace que la grève ne s’étende dans les
entreprises avaient contraint Chirac, alors à l’Élysée, à déchirer sa loi
pourtant dûment votée et ratifiée. Et cela est vrai dans les deux sens. C’est
parce que des femmes et des médecins de plus en plus nombreux ne respectaient
pas la loi interdisant l’avortement que Giscard d’Estaing et Simone Veil ont
fait voter une loi autorisant et encadrant l’IVG.
La fébrilité que montrent les
ministres et les députés qui les soutiennent doit être un encouragement à
augmenter la pression, non seulement en manifestant, mais en se mettant en grève
dans le maximum d’entreprises.
Xavier LACHAU (Lutte ouvrière
n°2844)