C’est le
grand patronat qu’il faudra jeter à la rue
On aura tout vu, voilà que le
patronat organise une semaine de « mobilisation » !
Gattaz, le représentant du Medef, qui regroupe des grands patrons comme
Pinault, Arnault ou Dassault, parle, sans rire, de la « souffrance des
patrons ».
On
imagine combien les fins de mois doivent être difficiles pour ce grand patronat
qui se partage les dividendes des grands groupes. On imagine la souffrance des
grands actionnaires de L’Oréal qui doivent se contenter des 2,9 milliards de
profits nets quand la BNP Paribas en affiche 4,8 et Total 8,4 !
Quant au
PDG de Sanofi qui a gagné 8,6 millions d’euros en 2013, soit 500 années de
Smic, et Bernard Arnault, le patron de LVMH appointé à 8 millions, on les voit
bien dénoncer les hausses d’impôts autour d’un repas à quelques centaines
d’euros.
Ces
« malheureux » ne se donneront tout de même pas la peine de
manifester. Le Medef ayant prévu de s’en tenir à un meeting et une pétition, il
n’y a aucune chance de croiser Arnault ou Pinault dans la rue. Il faut dire
qu’ils n’ont pas besoin de défiler, puisque ce sont les ministres qui défilent
à chacune de leurs réunions, et qu’ils peuvent s’inviter comme ils veulent à
l’Elysée.
Non, ceux
que l’on a vu battre le pavé, ce sont les petits patrons, ceux du bâtiment ou
de la métallurgie, qui ont répondu à l’appel de la Confédération générale des
PME. Autrement dit, le grand patronat a réussi à mobiliser derrière sa cause la
grande masse des petits patrons qu’il est en train d’étrangler.
Les
problèmes de nombreux petits patrons confrontés à la chute de leurs carnets de
commandes sont réels. Mais ils le sont d’autant plus que les grandes
entreprises et les banques ne leur font pas de cadeaux. Combien d’agriculteurs,
d’artisans et de petits commerçants ruinés par la concurrence des Carrefour et
autres Auchan ? Combien se sont vus refuser le crédit qui leur aurait
permis de traverser une mauvaise passe ?
Les
grands groupes traversent la crise sans encombres parce qu’ils la font payer
aux travailleurs mais aussi parce qu’ils se servent des plus petites
entreprises comme d’amortisseurs en arrêtant net leurs contrats ou en leur
imposant des prix cassés.
Et
l’inégalité ne s’arrête pas là. Quand une PME est effectivement taxée à
30 % au titre de l’impôt sur les sociétés, les entreprises de plus de 2000
salariés ne le sont, en moyenne, qu’à 13 %, et les entreprises du CAC 40 à
8 %. Et c’est sans parler des mastodontes comme Total qui réussissent à
payer zéro euro d’impôt sur les sociétés.
L’ironie
de la situation est que les petits patrons donnés en exemple vont porter des
revendications qui ne sont pas les leurs. Qu’est-ce que cela peut changer, pour
eux, que le dimanche devienne un jour travaillé comme les autres ? La
plupart des commerçants y sont même opposés car ils savent qu’ils ne pourront
tenir face à la grande distribution.
Nombre de
petits patrons et commerçants savent que leur sort est lié à celui des
travailleurs puisque leur chiffre d’affaires en dépend. Quand il y a des
licenciements dans les grandes entreprises, ils savent qu’ils finiront, eux
aussi, par en payer le prix.
Mais
comme tous les patrons ils se disent accablés de « charges »,
dénoncent le coût du travail. Comme les gros, ils voudraient pouvoir être plus
libres de licencier.
C’est
plus fort qu’eux parce qu’ils ont, en commun avec le grand patronat, de faire
partie des privilégiés de cette économie en vivant de l’exploitation des
travailleurs. Ils en vivent plus petitement et plus difficilement parce qu’ils
subissent la loi du plus fort et qu’ils sont bien des fois victimes de la
voracité de plus gros qu’eux. Mais c’est leur système, et ils le défendent.
Le
désespoir de certains d’entre eux sert d’alibi au Medef pour arracher de
nouveaux cadeaux au gouvernement. C’est le grand patronat qui tirera encore son
épingle du jeu, comme il le fait depuis que la crise a éclaté.
Les
grands patrons ont tout pour eux. Ils sont à la tête de grands groupes qui ont
des filiales partout dans le monde. Ils ont les banquiers à leurs pieds, quand
ils ne sont pas aussi banquiers eux-mêmes. Ils ont guichet ouvert auprès des
pouvoirs publics, ils ont mille et un moyens de s’arranger avec le fisc. Et,
bien sûr, ils ont le gouvernement pour eux.
Hollande
a fait tout ce qui était en son pouvoir pour favoriser le patronat et reporter
le poids de la crise sur les travailleurs eux-mêmes.
Cette
semaine « patronale » risque d’accélérer encore les coups portés
contre la classe ouvrière. Pour les empêcher, ce sera aux travailleurs de se
mettre en action et de revendiquer pour eux, pour leurs conditions de travail
et pour leur vie.