Succès du
12 juin et manœuvres syndicales
13 Juin
2018
Les 12
et 13 juin, la grève des cheminots tenait toujours bon, après deux mois et
demi. Le 12 juin, baptisé « journée de la colère cheminote », la participation
à la grève remontait partout. Hormis la journée du 14 mai, « journée sans
cheminot » qui avait retrouvé de façon exceptionnelle les chiffres du début de
la grève, c’était la plus importante journée depuis plusieurs semaines.
D’après
les chiffres de la direction de la SNCF, alors que le pourcentage de grévistes,
tous collèges confondus, oscillait entre 13,7 % et 15,5 % depuis un mois, il
est remonté à 17,7 %. Il était de 26,6 % à l’exécution, de 53,4 % chez les
conducteurs, et de 45,5 % chez les contrôleurs, partout en progression sur les
précédentes journées. La participation aux assemblées progressait elle aussi,
même si seule une minorité de grévistes y participe.
La
poursuite de la grève a tout d’abord une signification politique : l’opération
de diversion autour de la reprise par l’État de 35 milliards de dette ou au
sujet des amendements du Sénat a fait chou blanc. Et pour cause : le transfert
des cheminots au privé, sous menace de licenciement, est confirmé. Le droit au
retour à la SNCF dans un délai de trois à huit ans ne serait possible qu’en cas
de poste vacant, c’est-à-dire au bon vouloir de la SNCF, certainement pas des
cheminots.
D’autre
part, pas plus que celui de l’Assemblée, le vote du pacte ferroviaire par le
Sénat n’a démobilisé les grévistes : qui attendait autre chose de ces
assemblées de notables, grassement payés et férocement antiouvriers ? Dans de
nombreuses assemblées, ils évoquaient déjà la poursuite de la grève après le 28
juin, dernier jour du calendrier décidé par l’intersyndicale. Et la journée du
12 a été marquée par des manifestations et des actions souvent dynamiques.
Début de
lâchage de la CFDT ?
Dans
l’après-midi du 12 juin la CFDT cheminots, surtout présente chez les agents de
conduite, annonçait qu’elle appelait « les cheminots à assurer le service
des trains du quotidien pour les dates du 18 et 22 juin 2018 afin de permettre
le bon acheminement des lycéens sur leurs lieux d’examen » et donc à
suspendre la grève dans les RER et TER pendant la semaine du baccalauréat.
Si la
CFDT n’annonce donc pas encore son retrait du mouvement, c’est évidemment un
pas dans cette direction. En effet, la responsabilité vis-à-vis des lycéens est
pure mauvaise foi. Tout d’abord parce que Pepy, le PDG de la SNCF, s’est fait
fort d’assurer, sans avoir besoin du renfort de la CFDT, que « chaque lycéen
arriverait à l’heure » avec son plan « SNCF Exam ». Alors qu’il s’en
débrouille ! Et surtout, c’est entièrement le gouvernement qui porte la
responsabilité de la grève, en aucun cas les cheminots qui ne font que défendre
leurs emplois et leurs conditions de travail !
En
fait, le bac n’est qu’un prétexte pour la CFDT. Son souci est d’amorcer son
retrait sans se mettre en porte-à-faux vis-à-vis des grévistes et de son propre
milieu, alors que le pacte ferroviaire est unanimement refusé par les
cheminots. Et dans le même communiqué, elle est obligée de reconnaître que «
ni le patronat ni la direction de la SNCF […] n’ont rien proposé à ce jour de
nature à faire cesser les mouvements. »
Manœuvres
syndicales
L’absence
de concessions justifiant une sortie de grève est d’ailleurs le souci de
l’ensemble des directions syndicales. Rien n’a été concédé sur le pacte
ferroviaire. Elles réclamaient que soient abordées simultanément les
négociations pour la convention collective du ferroviaire, mais cela n’a pas
été le cas, le patronat du secteur préférant jouer la montre et ne pas dévoiler
ses projets pendant la grève. Elles ont ensuite demandé que le gouvernement
s’engage et pilote les négociations qui doivent s’ouvrir vendredi 15 juin avec
l’UTP, le patronat du ferroviaire, mais il ne s’est engagé qu’à dépêcher un
observateur pour cette « ultime réunion tripartite » selon les mots de la
ministre, Élisabeth Borne.
L’intersyndicale
devait donc se réunir à nouveau le 13 juin. Quels que soient les calculs
d’appareils, c’est l’unité et la détermination des grévistes qui seront vitales
pour l’avenir du mouvement. Et le succès du 12 juin montre qu’il est bien
vivant !