Algérie,
Soudan : des leçons et un avertissement pour les travailleurs
La montagne du « Grand
débat » a donc accouché de la souris de quelques mesures annoncées par
Macron lundi soir. Médias et politologues auront beau peser le peu qu’elles
apportent aux plus démunis et en faire le centre de l’actualité, cela ne changera
rien au fait que la vie devient de plus en plus difficile pour un nombre
toujours plus grand d’exploités et à l’abandon croissant de tous les services
qu’on dit encore publics : hôpitaux, écoles, Ehpad… Et tout cela pendant
que les grandes fortunes continuent à s’accroître, au détriment des classes
populaires.
Et même le peu que le pouvoir a
lâché aux plus démunis ne l’a été que parce que le mouvement des gilets jaunes
a témoigné de la colère de ceux qui ne possèdent pas de capitaux leur
permettant de parasiter le travail de la classe ouvrière.
Ce que le mouvement de
protestation a montré ici, en France, nous est montré, avec une ampleur bien
plus puissante, en Algérie et au Soudan, où la vie est bien plus difficile
encore pour les exploités et où aux inégalités s’ajoute une dictature
ouverte : seule la réaction venue d’en bas peut faire reculer le pouvoir
exercé au profit exclusif des grands possédants.
En Algérie, après des semaines de
manifestations qui ont commencé en février, la population a obtenu la démission
de Bouteflika, qui était au pouvoir depuis vingt ans. Le nouveau gouvernement a
promis la tenue d’un scrutin présidentiel le 4 juillet prochain. Il espère
ainsi canaliser l’aspiration au changement exprimée par la population et faire
élire un homme qui assurerait la continuité du régime. Les manifestations qui
viennent d’avoir lieu dans tout le pays le 12 avril montrent que la majorité de
la population ne veut pas se contenter d’un ravalement de façade et refuse
d’accorder la moindre confiance à ceux qui ont dirigé le pays avec Bouteflika
en réprimant toute opposition.
Au Soudan, depuis quatre mois,
des manifestations se déroulaient contre le renchérissement des produits de
première nécessité. Malgré la répression, elles n’ont cessé de s’amplifier.
Finalement, le 11 avril, l’armée a décidé de lâcher le dictateur en place
depuis 30 ans, organisant un coup d’État pour mettre en place un « Conseil
militaire de transition ».
Les travailleurs et les classes
populaires qui se sont mobilisées massivement en Algérie et au Soudan
contre la dictature ont montré qu’en luttant collectivement et d’une façon
déterminée, ils représentent une force énorme.
Mais ce qui se passe aussi bien
en Algérie qu’au Soudan nous montre aussi que cette force ne peut être efficace
qu’à condition d’être guidée par une politique qui se place du point de vue des
intérêts de classe des exploités. Cela nécessite que les exploités se donnent
une organisation représentant à la fois ces intérêts et une perspective pour
l’ensemble de la société.
La grande bourgeoisie, les
classes privilégiées ont à leur disposition un arsenal politique et des forces
de répression pour défendre leur domination. Ces serviteurs politiques ou
militaires ont les moyens d’inventer une multitude de subterfuges pour tromper
la majorité pauvre de la population et tenter de la conduire vers des voies de
garage. Et si ces subterfuges ne suffisent pas, ils feront appel à la
répression. En Algérie, de façon encore un peu déguisée, au Soudan de façon
brutale, c’est l’état-major de l’armée qui joue le rôle de centre dirigeant
pour offrir une solution à la classe dominante.
Eh bien, la principale leçon à en
tirer pour les classes exploitées, et avant tout pour le prolétariat, c’est
qu’il faut qu’elles disposent d’organisations susceptibles de devenir un
état-major face à ceux de la bourgeoisie, à commencer par un parti en lequel
elles se reconnaissent et qui sache opposer aux choix politiques de la
bourgeoisie une politique favorable aux masses populaires.
L’autre leçon, c’est que la
classe privilégiée n’abandonne jamais sans combattre. « Qui a du fer a
du pain » disait Blanqui, un grand révolutionnaire du 19ème siècle
parlant de l’armement des classes opprimées. Ce qui s’est passé en Égypte est
l’illustration de ce que font les oppresseurs à un peuple désarmé.
La lutte que mènent aujourd’hui
les travailleurs en Algérie et au Soudan, c’est aussi la nôtre, travailleurs de
France, celle que nous avons à mener pour renverser le pouvoir politique et
économique de la classe privilégiée et pour mettre fin à la mainmise du grand
capital sur la vie de la société.
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