Michel
Rocard : plein d’idées pour servir le capital
La mort de Michel Rocard a
suscité des hommages de gauche comme de droite, de Mélenchon à Chirac. Valls et
Macron, qui sont à la tâche pour le compte du patronat, peuvent à bon droit se
réclamer de l’héritage de ce politicien.
Haut
cadre de l’État depuis 1958, successivement inspecteur des finances puis
secrétaire général de la Commission des comptes et des budgets économiques,
Rocard avait quitté le Parti socialiste pendant la guerre d’Algérie. Il
participa à la fondation du PSU (Parti socialiste unifié), petit parti voulant
se démarquer de la politique de répression en Algérie des dirigeants
socialistes. Il en devint secrétaire général, peu avant que les événements de
mai 1968 permettent à ce parti de se donner pour quelque temps une image
d’extrême gauche.
Une
parenthèse utile
Cette
parenthèse permit à Rocard d’acquérir une virginité politique, avant de
rejoindre son parti d’origine, en damant le pion à nombre de ses rivaux.
Débarrassé de ses oripeaux gauchistes, il retourna au Parti socialiste en 1974,
critiquant dès lors tout ce qui pouvait apparaître, dans l’orientation déclarée
du PS, comme une entrave au libre marché.
Le
Parti socialiste, sous la direction de Mitterrand, avait repris un second
souffle grâce au Programme commun, cosigné avec le PCF en 1972, devenant pour
Rocard un tremplin autrement plus sérieux que le PSU. Il tenta par exemple de
prendre de vitesse Mitterrand, en annonçant en premier sa candidature à
l’élection présidentielle de 1981, puis de nouveau en 1988. Peine perdue,
Rocard fut contraint de s’effacer derrière Mitterrand et de se contenter d’être
son Premier ministre.
À
ce poste, Rocard créa la CSG, la contribution sociale généralisée, augmentant
la contribution des travailleurs au financement de la Sécurité sociale. Son
taux de prélèvement n’a depuis cessé d’augmenter, jusqu’à en faire le premier
impôt direct pesant avant tout sur les salariés, les chômeurs et les retraités.
Une
politique contre les travailleurs
Rocard
fut l’initiateur du « livre blanc » sur les retraites, qui prétendait dès 1991
qu’il n’était pas possible de payer les retraites selon l’ancien système. Il
mit sur les rails les attaques contre les retraites qui allaient être menées
par les gouvernements suivants.
Rocard
présida en 1988 aux accords de Matignon sur la Nouvelle-Calédonie, qui
entérinaient la prolongation du statut colonial de l’île, après la répression
meurtrière du mouvement indépendantiste, et qui blanchissaient l’État français
des exactions contre les Kanaks.
Rocard
s’illustra aussi dans la démagogie anti-immigrés, déclarant en 1989 : « Nous
ne pouvons pas héberger toute la misère du monde », récidivant ensuite à
plusieurs reprises.
Démissionné
en 1991, Rocard ne joua plus de rôle de premier plan. Il accepta cependant
différentes missions à la demande de Sarkozy, comme l’expertise sur la
contribution climat énergie, se prononçant pour une taxe carbone sur les
carburants, qui pénalise surtout ceux qui ne peuvent se passer de leur véhicule
pour se rendre au travail.
Toute
la carrière de Rocard, l’itinéraire de cet homme que l’on encense aujourd’hui
pour ses idées, sont à l’image de ces hommes d’État, qui peuvent changer
d’étiquette mais restent en permanence au service de la bourgeoisie.
Alain
CHEVARD (Lutte ouvrière n°2501)
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