dimanche 7 décembre 2014

IVG, loi Veil : un droit toujours à défendre



Loi Veil : l'IVG, un droit à défendre

Le 29 novembre était l'anniversaire du vote, il y a quarante ans, en 1974, de la loi Veil sur l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Les propos réactionnaires tenus par certains députés et politiciens, tout comme le bilan des conditions dans lesquelles les femmes avortent encore aujourd'hui, rappellent que ce droit, remis en cause ou encore à conquérir dans certains pays, est toujours à défendre en France.
Jusqu'au vote de cette loi et à sa promulgation en janvier 1975, toute femme qui avortait ou toute personne qui aidait une femme à avorter pouvait être condamnée à la prison. En 1942, l'avortement était un crime contre la sûreté de l'État, puni de la peine de mort. Cette peine fut abrogée à la fin de la guerre en ce qui concerne l'avortement, tout le reste de l'arsenal législatif fut maintenu jusqu'en 1974. Et ce ne fut qu'en 1967 que l'accès à la contraception fut quelque peu libéralisé.
Votée en 1974, sous la pression des femmes qui luttaient depuis plusieurs années, cette loi fut une avancée considérable. Il fallut encore huit années pour parvenir à ce que l'IVG soit remboursée, en 1982, et cinq années supplémentaires pour que l'article de la loi répressive de 1920 interdisant toute publicité pour les préservatifs, en tant que moyen contraceptif, soit abrogé.
Mais le droit d'avoir recours à l'IVG est toujours menacé aujourd'hui.
Les opposants à l'IVG n'ont pas baissé les armes, même s'ils ne semblent représenter qu'une minorité à l'Assemblée. À l'occasion des quarante ans de l'IVG, lors du vote symbolique à l'Assemblée, le 29 novembre dernier, d'un texte réaffirmant ce droit fondamental, sept députés ont en effet voté contre. On a pu entendre l'ancienne ministre Christine Boutin déclarer à cette occasion : « Il y a quarante ans je recevais un coup de poignard dans le cœur avec le vote de cette loi. » Le député et maire d'Orange d'extrême droite Jacques Bompard est monté à la tribune pour demander « pardon pour les enfants qui ne naîtront pas », assimilant le féminisme à des « élans morbides » ! De quoi encourager les féministes en question à reprendre un vieux slogan crié lors des manifestations à l'encontre de politiciens particulièrement réactionnaires : « Ah ! Si ta mère avait connu l'avortement... »
Certains mouvements, comme la fondation Lejeune, lobby anti-avortement, ou Alliance Vita, continuent de s'opposer à ce qu'ils nomment la banalisation de l'IVG. Véronique Sellier, co-présidente du Planning familial, constatait que les manifestations des opposants au mariage homosexuel, qui ont rassemblé les milieux de droite et d'extrême droite derrière le mouvement de la Manif pour tous, ont « décomplexé la parole de certains ».
Si on n'assiste plus à l'intervention de commandos anti-IVG à la porte des centres hospitaliers, des médecins continuent à invoquer la « clause de conscience » pour refuser d'aider les femmes à avorter, surtout entre dix et douze semaines, délai rallongé en 2001. Cette clause de conscience, permettant à un médecin de refuser une IVG, tout comme le délai obligatoire de sept jours de réflexion pour la femme entre les deux premières consultations, n'ont toujours pas été supprimés.
Et, de manière plus générale, la progression des idées réactionnaires, le poids des obscurantismes exercent une pression toujours plus grande contre la liberté des femmes en général, et contre la liberté d'avorter en particulier.
À cela s'ajoute le manque de moyens, en particulier le manque de structures adaptées. Un grand nombre de structures pratiquant l'avortement ont été fermées, pour des questions de rentabilité financière. Un rapport du Haut conseil à l'égalité dénonce ainsi une situation où « 5 % des établissements publics et 48 % des établissements privés pratiquant l'IVG ont fermé ces dix dernières années, soit plus de 130 établissements au total ». 37 % des gynécologues partiront à la retraite dans les cinq ans, sans qu'il y ait une politique permettant de former une relève. Les difficultés d'accès à l'IVG dans certaines régions font que, parfois, le délai légal de 12 semaines est dépassé et l'ultime recours est de se rendre dans un pays où les délais pour avorter sont supérieurs. 3 500 à 5 000 femmes seraient concernées chaque année. Avorter est plus ou moins facile selon les régions. « C'est plus facile à Lille qu'à Fourmies où, malgré la bonne volonté, le dernier médecin qui pratiquait des avortements à la maternité n'est pas remplacé depuis un an et demi », dénonce encore la coprésidente du Planning familial.
Quarante ans après le vote de la loi, l'IVG est un droit pour lequel il faut toujours lutter.
                                                                                            Aline Retesse


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