lundi 15 octobre 2012

Ecole privée : un article du 13 mars 2007 de l'hebdomadaire Lutte Ouvrière (n°2016)


École privée : partenaire de la gauche comme de la droite


Dans un entretien au Monde de l'éducation, Ségolène Royal dit vouloir « intégrer le privé à la réflexion sur la lutte contre l'échec scolaire », au nom de la justice pour l'école publique qui est obligée d'accueillir tous les élèves, alors que la plupart des établissements privés les choisissent et évitent les cas difficiles.
     Il y a un peu plus d'un mois, Nicolas Sarkozy déclarait lui aussi : « Je veux que soit reconnue l'utilité sociale de l'enseignement privé, en lui permettant d'ouvrir des établissements y compris dans les quartiers où s'accumulent tant de difficultés. »
     Quant à Bayrou, il « n'oppose pas école privée et publique », toutes deux « utiles à la France, aux familles ». Et surtout, dans ce domaine, il a laissé un souvenir mémorable. Il fut en effet ministre de l'Éducation dans le gouvernement Balladur dont le porte-parole était à l'époque un certain Nicolas Sarkozy. C'est ce gouvernement qui tenta en 1994 de faire financer, sur les fonds des collectivités locales, les locaux des écoles et lycées privés. Cette révision de la loi Falloux, qui régit l'enseignement privé, tomba dans les oubliettes après avoir déclenché de gigantesques manifestations de protestation.
     On voit aujourd'hui une belle unanimité chez tous ces candidats en ce qui concerne l'enseignement privé, ou plutôt confessionnel, car il est à 95 % catholique. Il est tout naturellement défendu par la droite, à l'électorat conformiste et bien-pensant. Mais il n'est absolument pas remis en cause par la gauche. Ce n'est pas nouveau. En 1992, c'est Jack Lang qui fit entériner un accord avec l'enseignement privé pour autoriser un financement des écoles par le département. Quant à Rocard, ministre de l'Agriculture en 1984, il avait fait adopter une loi autorisant le financement des établissements agricoles privés sur les fonds de l'État.
     Ségolène Royal n'innove donc pas : en présentant sa proposition comme une façon de rétablir l'équilibre entre le public et le privé, elle espère peut-être avoir l'assentiment d'un certain nombre d'enseignants qui déplorent la fuite de leurs « bons élèves » vers l'école privée. Elle espère peut-être aussi, du même coup, récupérer des voix qui auraient tendance à s'égarer du côté de Bayrou. Mais surtout, elle va dans le sens du désengagement de l'État dans les services publics.
     Si l'on veut remédier aux maux de l'école, la première mesure à prendre est de réserver l'argent public à l'école publique, et de lui donner les moyens de remplir son rôle correctement. Mais cela ne fait partie ni du programme de la droite réactionnaire ni de celui de la gauche timorée.
                                                                                             Sylvie MARÉCHAL

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