Guerre en
Ukraine : la fuite en avant de Poutine
21 Septembre 2022
Le Kremlin vient d’annoncer
plusieurs mesures directement liées à la guerre en Ukraine et à son
intensification : une mobilisation dite partielle concernant 300 000
réservistes et la tenue de référendums sur le rattachement à la Russie de
quatre régions ukrainiennes.
Après une série de revers militaires
et la perte de territoires en Ukraine, Poutine a besoin de renforcer son armée.
Mais il lui faut aussi regagner du terrain : sur le front, dans l’opinion
publique et auprès des cercles dirigeants russes, le « parti de la
guerre » et les milieux ultra-nationalistes. En effet, ces jours-ci des
critiques s’y sont exprimées sur la façon dont les généraux mènent les
opérations militaires, ce qui, à travers eux, pouvait viser leur chef, Poutine.
Des gains
de territoire à tout prix
Le Kremlin ne semble pas craindre
le résultat de ces référendums. Les républiques sécessionnistes de Lougansk et
de Donetsk, à l’extrême est dans le Donbass, ont une population largement
prorusse et, depuis 2014, une administration et des forces armées que Moscou
encadre. Quant aux deux autres régions, celles de Kherson au sud-ouest et de
Zaporijia au sud, elles ont une population majoritairement russophone, placée
depuis des mois sous administration prorusse et sous le contrôle des troupes du
Kremlin.
Dans les faits, leur rattachement
à la Russie ne changera pas grand-chose sous l’angle militaire, ni du point de
vue de la vie de populations soumises depuis des mois, voire des années, aux
horreurs de la guerre.
C’est pour le pouvoir russe que
cela change la donne. Rattachées à la Russie, ces régions auront plus de valeur
dans d’éventuelles tractations à venir avec Kiev et Washington autour du sort
et du statut de l’Ukraine.
Dans l’immédiat, ce probable
agrandissement du territoire de la Russie viendrait à point nommé pour conforter
Poutine dans son rôle de chef de guerre engrangeant les victoires sur les
ennemis de la Sainte Russie. Car c’est cette image nationaliste, ternie par
l’échec de son offensive éclair sur Kiev et les reculs de son armée, qui lui a
permis de disposer d’un certain consensus dans l’opinion et ainsi d’asseoir le
pouvoir qu’il incarne : celui de chef de la bureaucratie, cette caste
parasitaire qui dirige la Russie autant qu’elle pille ses ressources et sa
population.
Mais Poutine sait aussi que la
popularité qu’il retire de cette posture et l’autorité que cela lui vaut auprès
de la caste dirigeante ne sont pas gravées dans le marbre.
Des
effets « collatéraux » de la guerre
Ainsi, un institut russe de
sociologie renommé vient de publier une étude où il note que « près
d’une personne sur cinq interrogées s’attend à des protestations »
contre la guerre. En clair, malgré la censure, les arrestations et
condamnations continues, la contestation n’a pas disparu. Et elle pourrait se
nourrir de défaites militaires qui agissent comme des révélateurs des
faiblesses et turpitudes du pouvoir russe.
Cette guerre, dans laquelle le
Kremlin s’est enlisé lui-même, permet à l’impérialisme, surtout américain,
d’épuiser le régime russe. Elle a aussi pour effet de remettre en cause le rôle
de parrain de l’espace ex-soviétique que le pouvoir russe gardait plus ou moins
jusque-là.
On vient d’en avoir une
illustration dans le Caucase, puis en Asie centrale. L’Azerbaïdjan, appuyé par
la Turquie qui aimerait remplacer la Russie comme puissance tutélaire de la
région, a, malgré un accord de paix signé en 2020 sous l’égide de Moscou,
attaqué l’Arménie, que la Russie protège, dans le Haut-Karabakh, une région
contestée depuis plus de trente ans. Résultat : des centaines de morts,
militaires et civils, de part et d’autre, et une trêve aussi précaire que les
précédentes. Entre le Tadjikistan et le Kirghizstan, deux États parmi les plus
pauvres de la planète, des affrontements militaires ont repris ces jours-ci,
autour d’une enclave tadjike, faisant déjà une centaine de morts et plus de
100 000 réfugiés.
Le scénario dans les deux cas est
similaire, l’éclatement de l’Union soviétique ayant élevé des barrières
étatiques entre les peuples et en leur sein, avec des régimes semi-dictatoriaux
qui se maintiennent au pouvoir en dressant régulièrement leur population contre
ses voisins. Et cela avec une Russie de Poutine qui n’a même plus les moyens de
prétendre jouer les arbitres entre des États censés être ses alliés et obligés.
Ce qui vient de se passer dans le
Caucase et en Asie centrale souligne l’effet de contagion, d’embrasement même
indirect, que la guerre en Ukraine peut avoir dans des contrées parfois fort
éloignées de la zone des combats.
Toujours
plus de chair à canon
La « mobilisation
partielle » décrétée par Poutine marque un pas de plus dans l’escalade
guerrière. Elle vise à remplacer les quelque 50 000 hommes que Moscou
aurait perdus en Ukraine en quelques mois. Pendant des semaines, Poutine a
répété qu’il refusait de recourir à la mobilisation générale. Il sait trop quel
effet dévastateur cela aurait pour le régime, et pour son chef, auprès de
familles populaires voyant qu’on leur enlève leur fils pour l’envoyer au front.
Et cela avec un risque élevé qu’il s’y fasse tuer, du fait d’un manque criant
d’équipements et d’encadrement, alors que les forces ukrainiennes disposent des
armements les plus modernes et les plus efficaces que l’Occident leur fournit.
Même si le décret de Poutine ne
veut pour l’heure enrôler « que » les réservistes, il a visiblement
choisi d’activer la machine à fournir de la chair à canon à ses généraux. Ces
dernières semaines, il avait quand même pris le soin de susciter des appels,
amplement relayés, en faveur de la conscription. Ils venaient de responsables
de partis – dont Ziouganov, le chef du KPRF, le parti dit communiste –,
d’hommes d’affaires, de gouverneurs et du président-dictateur de la
Tchétchénie, ces derniers s’engageant publiquement à envoyer des régiments de
leur région à la rescousse du pays.
Pour le moment, Poutine tente
d’apparaître comme celui qui refuse la conscription générale. En effet, il a
tout lieu de craindre qu’elle dresse contre lui les familles des conscrits et
qu’elle n’accélère un mouvement de fuite hors de Russie de jeunes, souvent
diplômés, qui ne veulent pas aller à la mort. Certains ont pris les devants et
constituent une part notable des 500 000 Russes, dont quelques oligarques
et des hommes d’affaires, qui ont quitté le pays depuis le début de l’année.
Après avoir voulu une armée qui
ne devait être constituée que de professionnels et d’engagés – souvent des
sans-emploi venus de régions pauvres de Russie –, le Kremlin enrôle aujourd’hui
des réservistes. Demain, à qui le tour ? Aux jeunes des dernières classes
de l’équivalent des lycées et collèges ?
Le « tsar » Poutine,
qui a fait sanctifier par l’Église russe le dernier empereur de la dynastie des
Romanov, pourrait alors, en tout cas, il faut le souhaiter, apprendre à ses
dépens, comme Nicolas II avec la révolution de 1917 née du premier conflit
mondial, que la guerre peut se retourner contre les dirigeants et les nantis
qui avaient intérêt à y jeter leur population.
Pierre LAFFITTE (Lutte ouvrière n°2825)
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Samedi 8
octobre, à 15h
Théâtre
de la Mutualité, 24 rue Saint Victor, Paris 5e
Entrée
libre
Les prochaines
permanences prévues.
- aujourd’hui vendredi
23 septembre, de 14 h.30 à 15 h.45 au marché du Val-Nord ;
-et de 17 h.15
à 18 h.15 au carrefour Babou.
-samedi 24
septembre, de 10 h.15 à 10 h.55 devant Monoprix,
de 11 h. à midi
au marché de la Colonie.
-de 11 h. à 11
h.45 devant Auchan au Val-Sud,
Et de 11 heures
à midi dans le centre commercial Joliot-Curie.
-dimanche 25
septembre, de 10 h.15 à 10 h.55 devant l’Intermarché du Centre ;
-et de 11 h. à
midi au marché Héloïse.
-lundi 26
septembre, de 18 à 19 heures, centre commercial des Raguenets à Saint-Gratien.
-mercredi 28
septembre, de 11 h. à 11 h.30 au marché des Champioux.
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