Yémen,
catastrophe humanitaire : les grandes puissances responsables
La situation de la population au
Yémen depuis mars 2015, date du début de la guerre opposant la coalition
dirigée par l’Arabie saoudite aux milices houthistes, ne cesse de s’aggraver. «
La misère fait plus de morts que la guerre elle-même » titrait Le
Monde du 21 septembre.
De mars 2015 à août 2018, la
guerre a fait entre 10 000 et 14 000 victimes, et provoqué le déplacement de
deux millions d’hommes, femmes et enfants. Mais c’est la famine qui menace
d’être la plus meurtrière car la guerre aggrave encore la crise économique et
sociale qui ravage le pays. Sur les 28 millions d’habitants que compte le pays,
22 millions auraient besoin d’une assistance humanitaire. Cinq millions
d’enfants souffrent de la faim. L’Arabie saoudite impose un blocus qui empêche
l’arrivée de l’aide humanitaire transitant à 70 % par Hodeida, le
principal port du pays. Et 90 % des besoins en nourriture, essence et
médicaments du Yémen dépendent des importations. Faute d’accès à l’eau propre,
plus d’un million de Yéménites, selon l’OMS, sont touchés par l’épidémie de
choléra qui a déjà fait plus de 2 400 morts entre septembre 2016 et mars 2018.
L’économie de ce pays, un des plus pauvres de la planète, s’écroule : les
fonctionnaires ne sont pas payés, la monnaie yéménite, le rial, a perdu un
tiers de sa valeur depuis janvier 2018, laminant les salaires, quand ils sont
payés, et accélérant l’envolée des prix.
À cela s’ajoute le chaos favorisé
par l’irruption de diverses milices : de fait, c’est la loi des bandes
armées.
La position géographique du Yémen
lui donne une importance stratégique. Il contrôle le détroit de Bab el-Mandeb
par lequel transite le quart du pétrole mondial et 10 % du commerce
maritime international, de quoi aiguiser bien des convoitises. L’Arabie
saoudite a de plus une frontière commune avec le Yémen de près de 1 800
kilomètres. C’est pourquoi la monarchie saoudienne a toujours considéré ce pays
comme sa zone d’influence, avec la bénédiction des États-Unis. C’est elle qui
est intervenue suite aux manifestations de 2011 contre Saleh, le dictateur
alors en place, pour tenter d’éteindre l’incendie, en soutenant Hadi, l’actuel
président. En mars 2015, c’est pour soutenir le pouvoir de son protégé que
l’Arabie saoudite a lancé une offensive contre les milices houthistes qui le
menaçaient.
Le conflit s’enlise depuis et les
puissances impérialistes, États-Unis en tête, laissent faire. Et pendant que
les civils meurent de faim ou sous les bombes fabriquées aux États-Unis, ou les
missiles made in France, l’ONU organise des réunions censées « mobiliser
davantage de soutien à la réponse humanitaire » comme celle du 24
septembre dernier, regroupant les puissances responsables du chaos.
Aline RETESSE (Lutte ouvrière
n°2617)
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