Après les pigeons, les rapaces de haut vol
Alors que le gouvernement vient de faire cadeau de 750 millions aux patrons de start-up, surnommés les « pigeons », les 98 patrons des plus grandes entreprises privées voient plus grand : ils veulent plusieurs dizaines de milliards.
Ils demandent la suppression de 30 milliards de cotisations
patronales sur deux ans et la baisse de l’impôt sur les sociétés. Pour
compenser le manque à gagner, ils conseillent, sans vergogne, de faire
payer toute la population en augmentant la TVA et de réduire les
dépenses pour les écoles, les hôpitaux et les autres services publics.
Parmi ces grands patrons, on trouve le PDG de Total : 12 milliards de
profits en 2011 ; celui de Sanofi : 8 milliards de profits le patron de
la BNP : 6 milliards ; celui de Pernod Ricard : 1 milliard… Et ce sont
eux qui se plaignent d’être arrivés « au bout du supportable » et qui dénoncent des « marges bénéficiaires historiquement faibles » !
Ce sont des pleurnichards doublés de menteurs car cette année encore,
en pleine crise, ces mêmes patrons du Cac 40, se sont engagés, à verser
38,3 milliards de dividendes aux actionnaires, des dividendes en
augmentation de 5 %.
Ils demandent une baisse de l’impôt sur les sociétés alors qu’ils ne
payent réellement que 8 %, bien loin des 30 % que payent les petites
entreprises. Ils revendiquent une baisse des cotisations sociales alors
qu’ils profitent déjà de 30 milliards d’exonérations. Ils sont déjà plus
que gâtés, mais ils en veulent toujours plus.
Et ils auraient tort de se gêner car c’est Hollande en personne qui
s’est engagé à les aider, au nom de la compétitivité. C’est le
gouvernement socialiste, lui-même, qui a demandé à Gallois, ancien grand
patron, de le conseiller sur le sujet, en sachant pertinemment qu’il se
ferait l’écho des demandes patronales.
Et cela n’a pas manqué. Le rapport Gallois, pas encore rendu public, n’est plus qu’un secret de polichinelle : il prône un « choc de compétitivité »
avec la suppression de 20 milliards de cotisations sociales. Hollande,
qui n’a pas encore décidé de l’ampleur et du rythme de ces cadeaux au
patronat, a d’ores et déjà pris ses distances avec ce rapport. Alors les
grands patrons ont décidé de faire monter les enchères en sachant que
pour obtenir 20 milliards, il faut en demander 30.
Patronat et gouvernement parlent d’un « pacte de compétitivité pour relancer la croissance et l’emploi ».
Autrement dit, s’il y a une baisse des cotisations patronales et si
l’on doit tous payer plus d’impôts ce sera pour notre bien. Ils veulent
nous faire croire que ce qui est bon pour les actionnaires de
Peugeot-Citroën ou de Sanofi est bon pour les travailleurs, bon pour
leur salaire et bon pour leur emploi alors que, depuis des années, les
actionnaires s’engraissent et les travailleurs se retrouvent de plus en
plus nombreux à la porte et dans la misère.
Les travailleurs ne doivent pas se laisser prendre au piège de la
compétitivité et du coût du travail, quand bien même on nous rabâche
jusqu’à la nausée que c’est une question de vie ou de mort pour les
entreprises françaises.
Dans bien des domaines le « coût du travail » ne joue pas sur les ventes. Total ne
vendrait pas plus d’essence, Orange ne placerait pas plus d’abonnements
téléphoniques, et McDo ne vendrait pas plus de hamburgers si leurs
cotisations sociales étaient réduites. Même dans l’industrie, salaires
et cotisations ne sont maintenant qu’une petite partie des coûts et
entre l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France, ils se valent.
Pour les grandes entreprises comme celles du Cac 40, les dividendes
et les intérêts versés à la minorité de capitalistes et de banquiers
coûtent deux fois plus que les cotisations sociales. S’ils estiment que
leurs prix de vente sont trop élevés face à la concurrence
internationale, qu’ils les réduisent en diminuant les marges
bénéficiaires et les dividendes.
Pour le patronat, ce sont toujours les salaires qu’il faut baisser.
Ce sont toujours les travailleurs qui doivent faire des efforts, être
plus flexibles, plus productifs. Mais les ouvriers de Roumanie, de Chine
ou du Maghreb, ont beau toucher des salaires deux, cinq ou dix fois
inférieurs à ceux d’ici, on leur sert, à eux-aussi, la propagande de la
compétitivité.
Alors, les travailleurs n’ont pas à se sacrifier au nom de la
compétitivité. Le capitalisme, c’est la guerre économique où les
actionnaires se disputent les marchés et les profits qui vont avec. Eh
bien dans cette guerre, les travailleurs n’ont pas à servir de chair à
canon. Ils doivent mener leur propre combat pour défendre leur emploi,
le pouvoir d’achat de leur salaire et de leur retraite.