Ces
derniers jours, la commémoration « people » du 70ème
anniversaire du débarquement de Normandie a surchargé les écrans et les ondes
pour ceux qui sont friands de ce genre de choses. Pour revenir aux réalités
effroyables du XXème siècle, il est bon de lire l’article de notre hebdomadaire
de cette semaine. Un roman « Les Croisés » de Stefan Heym (éditions
Les bons caractères) peut aider à remettre les pendules à l’heure.
La commémoration du 6 juin
1944 : 70 ans de guerres qui ont ensanglanté la planète
Vendredi 6 juin,
Hollande s'apprêtait à recevoir le gratin des chefs d'État et de gouvernement
pour fêter l'anniversaire du débarquement des forces alliées de 1944 en Normandie.
D'Obama à la reine d'Angleterre, en passant par Poutine et Angela Merkel,
tous ces invités du président français se félicitent de la paix qui règne entre
leurs différents pays depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, passant sur
les rivalités qui continuent de les opposer et les guerres qu'elles suscitent
aux quatre coins du monde.
Le débarquement du 6 juin
est souvent
présenté comme le tournant décisif de l'histoire de la guerre, voire comme un
tournant de l'histoire tout court. Avec le début de la défaite de l'armée
allemande, il marquerait même le début de l'ère de paix apportée au monde par
la victoire alliée.
Mais le
débarquement du 6 juin 1944 fut d'abord une boucherie pour les
soldats. La stratégie des généraux alliés était d'ailleurs assez simple :
il leur fallait être capables de débarquer sur les plages de Normandie plus d'hommes
que ce que l'armée allemande était capable d'en tuer. Il y eut en quelques
heures des milliers de morts tant du côté allié que du côté allemand. La
population civile, elle aussi, compta des milliers de morts dus aux
bombardements sur les villes normandes, dont beaucoup furent détruites en
quelques minutes.
Quant à
dire que le 6 juin 1944 aurait marqué le début de l'inversion du rapport
des forces militaires avec l'Allemagne, plutôt que la victoire de Stalingrad en
URSS un an et demi auparavant, sur le front oriental, cela est surtout affaire
de propagande. Pour présenter les États-Unis, le Royaume-Uni et accessoirement
la France comme des puissances libératrices, il vaut mieux prendre une victoire
militaire anglo-américaine comme référence qu'une victoire de l'Armée rouge,
même si ce n'est qu'une partie de la vérité historique.
En tout
cas, les chefs d'État des puissances impérialistes, qui prétendent célébrer la
paix, ne feront pas oublier que leurs armées n'ont cessé d'intervenir aux
quatre coins de la planète depuis 70 ans, notamment lors des guerres de
décolonisation. Et même quand ils ne sont pas intervenus militairement directement,
c'est la défense de leurs intérêts de grandes puissances qui a bien souvent été
à la cause de guerres terriblement meurtrières comme en Afrique, en Asie et
même en Europe.
À ces
cérémonies du 6 juin, le président russe Poutine et le président ukrainien
fraîchement élu Porochenko seront tous
deux présents, invités par Hollande, illustrant parfaitement l'hypocrisie de
cette grande messe. Pendant qu'en Normandie les chefs d'État se réunissent pour
vanter leur paix, à l'autre bout de l'Europe, en Ukraine, leurs rivalités et
leurs ingérences entraînent de plus en plus la population dans le chaos de la
guerre.
Pierre
Royan
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