La caravane passe, et l’exploitation ouvrière s’aggrave
La « caravane »
Uber a fait étape au Val-Nord à Argenteuil jeudi. Des centaines de travailleurs
en activité ou au chômage et des curieux s’y sont rendus. Le Parisien-95 en
rend compte dans un article très intéressant car très révélateur des
motivations de ces travailleurs face aux objectifs d’Uber qui remettent
fondamentalement en cause le Code du travail et la condition ouvrière sur un
certain nombre de points essentiels. Les travailleurs évoqués dans cet article
sont au chômage, ou bien ont des séquelles de leur activité antérieure, ou, ont
besoin de travail d’appoint car leur salaire ne leur permet plus de vivre…
En
tout cas, 70 000 « entrepreneurs » les conducteurs d’Uber ?
Certainement
pas.
En
revanche, un seul surexploiteur : Uber !
Sur
ce sujet, un article de notre hebdomadaire Lutte ouvrière du 18 mai dernier :
"Uber
: derrière la modernité, l’exploitation
L’Urssaf d’Ile-de-France a lancé
deux actions en justice contre Uber, la société de transport avec chauffeurs,
afin de faire reconnaître à ceux-ci le statut de salariés et de récupérer ainsi
les cotisations sociales correspondantes. En effet, derrière l’économie
numérique dont se réclament les patrons d’Uber et tous ceux qui y voient un
modèle pour le 21e siècle, se cache un moyen de s’affranchir des
règles du droit du travail.
Les chauffeurs d’Uber travaillent
comme indépendants, le plus souvent sous statut d’autoentrepreneurs. Uber se
contente de mettre en contact ces chauffeurs et leurs clients par le biais de
ses applications pour téléphone mobile, mais perçoit à ce titre une importante
commission. Derrière la prétendue indépendance des chauffeurs d’Uber se cache
une subordination totale à cette société.
C’est Uber qui fixe les prix et
les revoit du jour au lendemain à la baisse. Les chauffeurs avaient ainsi fait
grève en octobre dernier contre une baisse de 20 % et créé un syndicat pour
défendre leurs intérêts. Uber inflige aussi les sanctions, et bien entendu ne
paie pas de cotisations sociales, puisque c’est théoriquement aux indépendants
de le faire. S’ils ne déclarent pas leurs revenus, Uber s’en lave les mains.
C’est bien pourquoi l’Urssaf se retourne contre elle.
La rentabilité de la société est
bâtie sur ce système car, si Uber payait les cotisations sociales dues pour des
salariés, versait les salaires auxquels ceux-ci ont droit et devait respecter
la législation sur les heures supplémentaires, l’opération ne serait plus
rentable. Le modèle Uber cesserait d’attirer les investisseurs comme Google ou
la banque Goldman Sachs.
Internet et le téléphone portable
ne rendent pas l’exploitation moins sauvage. Des jeunes sans emploi, souvent
sans qualification, signent chez Uber. Dans tous les pays pauvres, ceux qui ont
une voiture s’en servent déjà pour gagner un peu d’argent en jouant les taxis.
Avec Uber, la même chose se produit dans les pays développés, la seule
différence étant qu’il s’est créé une société pour détourner une partie de
leurs revenus."
Daniel MESCLA (Lutte ouvrière n°2494)