Repris
du F de Juju. Liliane au jardin des Justes
Elle nous a quittés ce mercredi à
l’hôpital d’Argenteuil où elle avait été conduite le jour même. Ces temps
derniers, elle s’inquiétait sans trop s’inquiéter de son cœur. Le cœur a lâché.
Je
ne reviendrai pas ici longuement sur son histoire. Ses parents, juifs hongrois
naturalisés français furent exterminés à Auschwitz, victimes de l’horreur de la
« Solution finale » des
nazis d’extermination des juifs d’Europe.
Voilà
notre Liliane seule à 13 ans.
Installée
à Argenteuil il y a une trentaine d’années, elle a marqué la vie militante de
la Ville.
Elle
fut une militante d’un Comité des Sans-papier qui aujourd’hui encore marque la
solidarité entre les travailleurs, quelque que soient leurs
« papiers » ou pas.
Elle
fut également une militante de la mémoire, allant dans les établissements
scolaires échanger sur ces Années noires. Il y a quelques semaines encore, pour
cela, elle était à l’école Saint-Martin-de-France de Pontoise.
Elle
affirma jusqu’à la fin l’espoir d’une union dans l’égalité en Palestine-Israël.
Son
histoire l’avait conduite à rejoindre le PCF, le parti de ses parents disparus,
avec lequel elle avait pris ses distances, mais en gardant un lien moral
d’affection avec celui-ci. Cela dit, dernièrement, elle m’avait dit qu’au
moment de l’insurrection ouvrière de Budapest d’octobre 1956, elle avait rendu
sa carte. « Lorsque je téléphonais à
ma famille restée sur place, et que j’entendais le bruit des armes, je ne
pouvais tout de même pas faire autrement ».
Liliane
et moi, nous nous sommes connus dès les premiers temps de son arrivée à
Argenteuil.
Elle
fut avec deux autres camarades du PCF d’Argenteuil, Marcel Collet et le
camarade Aguiton, la première à briser l’ostracisme de son parti à l’égard des
communistes révolutionnaires, trotskystes, de Lutte ouvrière, en venant à la
fête de Presles et à notre banquet local que nous développions alors.
Elle
tenait à répéter qu’elle n’était pas trotskyste, mais cela ne l’empêchait pas
de se reconnaître sur bien des points dans ce que nous faisions, notre
engagement militant, la volonté de reconstruire, la fraternité que nous
essayons de partager.
Elle
pouvait être grognon, mais d’année en année, elle continuait même à s’améliorer
sur ce plan. Mais quel intérêt pour les autres ! pour l’humanité de
chacun ! qui fait que nous sommes nombreux à être très tristes, au-delà de
nos opinions, de nos petits groupes, de nos croyances ou pas.
Ces
derniers mois, nous avons continué à faire de belles choses avec Liliane. En
novembre, nous étions ensemble pour aller voir la troupe Joli Môme. En
décembre, couscous de noël ! Et puis, ce dimanche, nous avions repris nos
habitudes dominicales, autour de la table de Dominique au marché Héloïse.
Liliane, Dominique, Thierry, Isabelle, Nordine, Florian, Julie, Léna, le passé et
l’avenir ensemble. Nordine est parti chercher les cafés…
Et
puis, une semaine plus tôt, il y avait eu le magnifique Salon du Livre de Sous
les couvertures. Liliane en était la vedette, comme une semaine plus tôt lors
de la soirée avec Romain Slocombe. Elle dédicaçait son beau Livre au titre
tellement juste « Une ombre entre
deux étoiles », réédité par l’association comme un remerciement pour
Liliane. Elle était rayonnante ces deux jours-là, comme dimanche, …
Il
y aura dans notre souvenir une troisième étoile, Liliane.
Dominique