lundi 3 novembre 2014

Editorial des bulletins Lutte Ouvrière d'entreprise de ce lundi 3 novembre 2014



Deux ans et demi de bons services rendus au patronat

Cela fait deux ans et demi que Hollande est au pouvoir. Deux ans et demi pendant lesquels le grand patronat a continué de faire payer la crise aux travailleurs à coups de fermetures d’usines, de restructurations et de licenciements. Au nom de la compétitivité, les jours de congés ont été rognés, le travail a été intensifié, les salaires ont été bloqués ou baissés. Et deux ans et demi pendant lesquels le gouvernement a justifié, secondé et aggravé l’offensive patronale.
Réforme des retraites, augmentation des impôts, loi sur la flexibilité, coupes dans les services publics, le gouvernement a accumulé les réformes anti-ouvrières et multiplié les cadeaux au patronat.
Le budget 2015 est le résumé de cette politique pro patronale. Pour atteindre les 50 milliards de coupes budgétaires, combien de lits et de services seront encore fermés dans les hôpitaux ? Combien d’écoles ne pourront être restaurées, combien de prestations sociales amputées ? Et tout cela pourquoi ? Pour que le gouvernement fasse 41 milliards de cadeaux au patronat.
Car il s’agit bien de cadeaux. Le Crédit d’impôt compétitivité emploi est en place depuis janvier 2013. Il n’a eu aucun effet, ni sur les emplois, ni sur l’investissement. Aujourd’hui, le gouvernement fait mine de hausser le ton : « Maintenant, il faut que le patronat tienne ses promesses », dit-il. Quel cinéma ! Si le gouvernement n’a mis aucune condition et aucune obligation sur l’utilisation de ces 41 milliards d’aides, c’est qu’il veut les laisser à la libre disposition du patronat.
Comme les enfants gâtés, les représentants patronaux en demandent toujours plus. Après avoir obtenu du gouvernement le report de la mise en place du « compte pénibilité » pour les retraites, le patronat demande sa suppression pure et simple : « trop compliqué », dit-il ! Alors que 80 % des contrats de travail signés sont déjà des CDD, le patronat demande la suppression du CDI ! Pourquoi se priverait-il quand ses désirs sont des ordres pour le gouvernement ?
Pendant ces deux ans et demi, le gouvernement n’a pas seulement épousé la politique du patronat, il en a épousé les discours et les mots. Il est désormais de bon ton dans la gauche gouvernementale de dénoncer le « carcan » du code du travail, le « verrou » des 35 heures ou encore le « tabou » des allocations chômage.
Valls comme le patronat veulent faire passer les travailleurs qui défendent leurs droits pour des passéistes. À les entendre, la modernité, ce serait de banaliser le travail du dimanche, de supprimer des droits syndicaux, de revenir sur le CDI et de travailler jusqu’à 67 ou 70 ans, autrement dit… de revenir au 19ème siècle !
La modernité qu’ils nous construisent, on ne la connaît que trop ! C’est celle que l’on a vue chez Gad, des ouvriers mis en rangs d’oignons et appelés par ordre alphabétique pour savoir qui, parmi eux, aura encore le droit de travailler et qui sera licencié. C’est 6 millions de chômeurs, 3,3 millions de personnes sans mutuelle, des retraités ou des smicards forcés de compter chaque euro. Et à l’opposé, ce sont des actionnaires choyés aussi bien qu’avant la crise, un nombre de milliardaires en hausse et des grandes fortunes qui n’ont jamais été aussi élevées.
C’est encore au nom de la modernité que Valls veut jeter aux orties la référence au socialisme, car « le socialisme, ça a été une merveilleuse idée, une splendide utopie… mais c’est daté. Ça ne signifie plus rien », estime-t-il.
Eh bien, les idées socialistes continueront d’exister longtemps après que Valls et Hollande, ces prétendus socialistes qui ne sont que les paillassons de la bourgeoisie seront tombés dans l’oubli !
Car ni l’un ni l’autre, ni même les candidats à leur succession, qu’ils soient à gauche, à droite ou à l’extrême droite, ne contestent le capitalisme et les véritables lieux de pouvoir et de décision que constituent les grands groupes capitalistes.
Les tares du capitalisme, l’accumulation de richesses à un pôle, la spéculation effrénée, le chômage de masse et les ravages sur la planète, ne peuvent être combattues sans remettre en cause leurs racines, la dictature de la classe capitaliste.
Cette conviction, qui était à la base des idées socialistes et communistes, est plus que jamais valable. Le socialisme n’a jamais été une utopie au sens d’un rêve inaccessible. Cela a été un combat politique porté par une classe sociale consciente qu’elle pouvait libérer la société de l’exploitation et l’entraîner vers un avenir meilleur.
Pour les travailleurs, conscients que le capitalisme est en train de pourrir sur pied, ce combat est d’une actualité brûlante, et il se mènera contre le parti dit « socialiste ».

Lettre du maire d'Argenteuil de novembre : non seulement le bleu mais aussi le rose


La vie en rose du maire d’Argenteuil

 
Dans sa « lettre du maire » de novembre, M. Mothron en ce temps de la Toussaint voit la vie en rose. Fini le catastrophisme à l’encontre de la situation financière de la Ville, sa mise sous tutelle qu’il présentait inévitable. On se croirait à la veille des élections lorsqu’il promettait comme à l’habitude de ces gens des lendemains locaux qui chantent pour tous les habitants. La conclusion de cette lettre de novembre :

« Mon engagement est à la hauteur de nos ambitions. Restaurer un climat de confiance, d’apaisement, de transparence et de justice. C’est à ce prix qu’une nouvelle page de l’histoire de la ville s’écrira. »

C’est joli, mais dans sa lettre rien sur les impôts locaux que nous sommes en train de payer, la rage au cœur.

En revanche, voyant son rôle en rose, il est fier d’avoir brisé la grève pour leur dignité des agents des écoles et des centres de loisirs  où il aurait été capable, dit-il, de mobiliser plus de 200 personnes pour gardienner… 1000 enfants sur les 13 000 en question. Ce n’est pas de « briser » une grève qui « honore le service public » c’est de donner un exemple à tous qu’il n’y a aucune raison d’accepter un mépris à la manière des nobles envers leurs manants.

Le maire voit la vie en rose à propos des perspectives territoriales : « une nouvelle agglomération plus large et plus dynamique qui nous permettra de constituer un territoire capable de dialoguer et de peser au sein du Grand Paris ». Oui, cette zone UMP pèsera certes dans les réseaux d’influence du Grand Paris « hypothétique », mais comment pèsera dans tout cela  au sein de cette zone, la populaire Argenteuil ?

Le maire voit la vie en rose pour les agents peut-être déCAABilisés demain qui : « conformément à la loi, bénéficieront d’une protection de leur emploi, de leur rémunération et de leur déroulement de carrière ». Mais où, si cela était, vivront-ils ce compte de fée ?

Revenons les pieds sur terre, une terre qui n’est pas rose, et qui, sur tous les problèmes, locaux, mais avant tout à l’échelle du monde et du pays, exigent réflexion et action.

Argenteuil : les illuminés


Décors de noël à la toussaint, chagrin !

 
Après la lecture de cette lettre du maire de novembre, nous ne nous étonnons vraiment plus de ce qui nous a frappés hier au soir, rond-point Marcel Dassault, près de la Sous-préfecture, la nuit tombée. Puisque l'optimisme est revenu, les décors doivent être à l'avenant !

         Sur ce rond-point, nous avons été « enchantés » par une féérie de la reine électricité, par des guirlandes resplendissantes de bleu « UMP » (breveté) et d’argent.

         Nous étions le 2 novembre, à presque deux mois encore de ce noël c’est vrai si cher aux édiles argenteuillais, mais pourquoi une telle débauche de décors et d’électricité, alors que l’on nous dit que les caisses sont vides, et que c’est la rage au cœur que les habitants subissent la hausse de la taxe d’habitation.

         Alors, les difficultés financières sont derrière nous ?

Ce n’est tout de même pas la famille Dassault qui aime financer la banlieue qui a financé ces décors ?

Gaz, électricité : augmentations scandaleuses. Un article extrait de notre hebdomadaire.


Gaz, électricité : augmentations scandaleuses

 
Les tarifs du gaz et de l'électricité vont augmenter le 1er novembre. Pour le gaz, ce sera 2,31 % de plus, alors que le 1er octobre il avait déjà subi une hausse de 3,9 %.
         Le gouvernement avait expliqué que dorénavant il y aurait une autre formule de calcul des prix, pas uniquement indexés sur les cours du pétrole, mais aussi sur les prix de gros du gaz naturel. Or les cours du pétrole baissent de peu, mais ils baissent tout de même. Quant aux prix de gros sur le marché dit spot, ils baissent également. Par quelque bout qu'on prenne cette question, le prix du gaz devrait baisser.
Quant à l'électricité une hausse de 2,5 % est prévue, que le gouvernement doit confirmer. Là aussi on nous explique qu'EDF doit récupérer ses coûts de production. Soit, mais il semble bien qu'EDF les récupère et largement puisqu'elle fait de coquets bénéfices : 3 milliards d'euros en 2011, 3,3 milliards en 2012, 3,6 milliards en 2013 et encore 3,1 milliards rien que pour le 1er semestre 2014. Cela crève les plafonds !

         Il n'y a donc aucune raison d'augmenter les prix, si ce n'est qu'à la veille de l'hiver, EDF tout comme GDF Suez veulent s'en mettre plein les coffres.

André Victor

dimanche 2 novembre 2014

Indépendance algérienne : il y a 60 ans débutait la Guerre d'Algérie. Un article de notre hebdomadaire Lutte Ouvrière



Il y a 60 ans, 1er novembre 1954 : le début de la guerre d'Algérie

Le 1er novembre 1954, des bombes explosaient à Alger et dans différents lieux, marquant le début de la guerre d'Algérie. Les jours de la domination française, vieille alors de 124 ans, étaient comptés. Le pouvoir colonial allait user systématiquement de la torture, des sanctions collectives, déporter des centaines de milliers de paysans dans des zones contrôlées par l'armée française, sans pouvoir venir à bout de la détermination des Algériens à combattre l'oppression dont ils étaient victimes. Le 5 juillet 1962, après huit ans de guerre et un million de morts, l'Algérie serait indépendante.
   Les militaires français avaient pris pied en Algérie en 1830, avant de se lancer dans ce qu'ils nommèrent eux-mêmes une guerre de ravageurs. La tactique du général Bugeaud se résuma à tout détruire sur son passage pour anéantir les populations. L'avancée des soldats signifiait des assassinats en masse, des villages entiers brûlés, des troupeaux et des terres dévastés. En 1845, de 500 à 1 500 hommes, femmes et enfants réfugiés dans une grotte furent tués, car un de ces colonels ravageurs décida d'attiser un feu durant 18 heures à son entrée pour les asphyxier. Ces actes de barbarie vinrent difficilement à bout de la résistance des populations. Il fallut quarante ans à l'armée française pour éteindre les révoltes. 

La domination coloniale

La population algérienne paya un lourd tribut à cette conquête. Entre les massacres et les famines dues aux dévastations et à la spoliation de millions d'hectares de terre, elle passa de trois millions à deux millions de personnes. Volée et affamée, réduite à la misère, elle se vit aussi privée de tout droit. Durant toute la période coloniale, les Algériens furent soumis au Code de l'indigénat qui en faisait des sous-citoyens. Un regard de travers pouvait être passible de peine de prison. Il fallait un permis pour circuler d'un village à l'autre. L'Algérie était française, mais les Algériens étaient des parias dans leur propre pays. Les enfants n'avaient pas accès à l'éducation et le système de santé, inexistant dans les campagnes, était réservé aux seuls Européens dans les villes. Et enfin des impôts dits « arabes », pesant sur les seuls Algériens, leur faisaient payer les frais de la colonisation.
À partir du début du XXe siècle, les paysans furent de plus en plus contraints de quitter les campagnes, leurs terres désormais accaparées par une poignée de grands colons, pour aller peupler les bidonvilles des métropoles algériennes ou françaises. La colonisation allait créer un prolétariat algérien, dont le sort serait désormais intimement lié à celui du prolétariat français.
C'est d'ailleurs le PC, en France, qui créa l'Étoile nord-africaine (ENA), première organisation - principalement composée de travailleurs algériens - revendiquant l'indépendance. Bien des militants nationalistes furent formés à cette école. Mais leurs revendications se heurtèrent systématiquement à la répression du gouvernement français, y compris en 1936 sous le Front populaire. Le gouvernement de Blum n'eut même pas le courage de présenter au Parlement un projet de donner le droit de vote à 21 000 Algériens. En revanche, la répression s'abattit sur les ouvriers algériens qui avaient fait grève et les paysans qui avaient occupé les terres des colons. Messali Hadj, le leader nationaliste algérien, fut envoyé en prison et ses partisans furent pourchassés.

Vers la lutte armée

Durant la Deuxième Guerre mondiale, des milliers d'Algériens furent enrôlés, car la puissance coloniale avait besoin d'eux pour rétablir sa domination. Cela allait changer bien des choses dans les consciences. Le 1er mai 1945, le PPA, nom du nouveau parti de Messali, appela à manifester pour l'indépendance de l'Algérie. Le PCF et la CGT dénoncèrent ces manifestants comme étant des « provocateurs hitlériens ». Le 8 mai 1945, à Sétif, lors de la manifestation pour « fêter la paix », la police tira sur un homme tenant un drapeau algérien. Cela déclencha la révolte de la population de la région. Le gouvernement français, dirigé par de Gaulle et comportant deux ministres communistes, engagea une répression dans la pire tradition de l'armée coloniale. Pendant que des milices d'Européens avaient quartier libre pour assassiner, des villages entiers étaient bombardés par l'aviation. Il y eut entre 20 000 et 40 000 morts du côté algérien.
Le gouvernement français fit ainsi la démonstration qu'il n'avait que des balles, des bombes et la misère à proposer aux Algériens. Tous les faux espoirs de changements politiques s'évaporaient. Les réformes introduites à partir de 1947 pour distiller une dose de droit de vote parmi les Algériens ne changèrent en rien la situation de misère et d'oppression. Les ferments de la révolte armée contre la présence française allaient germer dans la conscience de tous ceux qui avaient vécu Sétif.
Entre 1945 et 1954, le mouvement nationaliste algérien connut une période de crises et de divisions qui le paralysa, au moment où une vague de luttes pour l'indépendance des colonies secouait le monde. C'est dans ce contexte qu'une poignée de militants algériens créèrent le Front de libération nationale, le FLN, pour lancer la lutte armée. Ils ne pouvaient s'appuyer que sur leur détermination et l'existence, depuis 1945, d'un maquis en Kabylie.
Malgré leurs moyens extrêmement limités, en ce 1er novembre 1954, ils organisèrent divers attentats contre des casernes, contre des usines appartenant à l'État ou à de gros colons, qui résonnèrent comme un véritable coup de tonnerre. Le FLN déclarait ainsi la guerre au colonialisme français. En montrant leur détermination, ces militants, peu nombreux en 1954, allaient se placer à la tête de toute la population algérienne et mener la lutte pour l'indépendance jusqu'à son terme.

Huit ans d'une sale guerre

Le pouvoir colonial réagit avec les seules méthodes qu'il connaissait. Des milliers de personnes furent arrêtées. Les dirigeants politiques, dont un certain François Mitterrand, affirmèrent partout que « l'Algérie, c'est la France » et « la seule négociation, c'est la guerre ». La bourgeoisie française s'accrocha durant huit ans à sa colonie. La répression s'amplifia d'année en année. Les militaires eurent tout pouvoir pour torturer, massacrer et semer la terreur. Mais si la bourgeoisie put mener sa sale guerre, c'est aussi parce que le PCF comme le PC algérien, qui comportaient pourtant de nombreux militants prêts à combattre l'oppression coloniale et le pouvoir en place, n'avaient pas de perspective politique dans ce sens. Pendant que le communiste algérien Maurice Audin mourait dans les caves de l'armée française, le PCF soutenait le gouvernement du socialiste Guy Mollet, qui intensifiait la guerre et permettait la généralisation de la torture. Pendant que des militants communistes empêchaient les trains de rappelés de partir vers la guerre, le PCF se contentait de dire « Paix en Algérie », ce qui lui évitait de se prononcer clairement pour l'indépendance.
Les Algériens se retrouvèrent donc seuls pour combattre la bourgeoisie française et n'eurent d'autre choix que de se ranger derrière le FLN, qui s'imposa aussi en éliminant tous ses opposants politiques, en particulier les partisans de Messali. Le FLN cherchait, à travers cette guerre, à préparer un appareil d'État, principalement une armée, capable de s'imposer au jour de l'indépendance et de prendre le contrôle du pays, en imposant à la population les choix de la nouvelle bourgeoisie algérienne.
Le courage et la détermination de la population algérienne eurent raison de l'odieux régime colonial et permirent son émancipation nationale, même s'il lui reste, comme partout ailleurs, à gagner son émancipation sociale.
                                                             
                                                                                          Marion Ajar