Drogue à
Marseille : le fléau et le démagogue
05 Juillet 2023
Macron, en tournée promotionnelle
à Marseille, ne pouvait pas éviter la question de la drogue. Dans cette ville
où la guerre des gangs a déjà fait 23 victimes cette année, le trafic est une
véritable plaie pour les habitants des quartiers populaires.
Les familles y redoutent de voir
leurs enfants embarqués dans une bande ou victimes d’une balle perdue.
Les solutions de Macron sont
connues : davantage de policiers et d’amendes, des conseils gratuits et
l’appel à une prétendue responsabilité collective. Si l’arrivée de la police
disperse les dealers et les guetteurs, son départ les ramène immédiatement, le
problème n’étant que provisoirement déplacé. En outre, lors de ses descentes,
la police s’en prend souvent indistinctement à tous les passants, méprisant et
brutalisant les plus jeunes, multipliant les bavures qui vont du passage à
tabac aux violences mortelles. Exiger, comme le propose Macron, le paiement
immédiat en liquide ou en carte d’une amende forfaitaire de 200 euros pour
consommation de cannabis aura l’effet habituel des rodomontades
administratives : retomber sur les plus démunis socialement, amuser
trafiquants petits et grands, hérisser les fonctionnaires chargés d’appliquer
cette mesure, sans aucun résultat quant à la consommation.
Le président a évidemment dit
qu’il fallait protéger les plus jeunes et qu’on allait les prévenir dès l’école
des dangers de la drogue et du trafic. Comme si parents, enseignants,
éducateurs, militants associatifs et tout ce que la société compte d’adultes un
tant soit peu responsables et crédibles ne le faisaient pas déjà. Enfin,
l’ancien banquier a affirmé que, s’il y a une offre de drogue, c’est qu’il y a
une demande et précisé qu’elle venait des beaux quartiers, où l’on ferait
l’apologie du cannabis récréatif. Et d’en appeler à la responsabilité
collective, expliquant une fois de plus les problèmes sociaux par la paresse
des classes populaires, qui fournissent les dealers, et la perversité des
intellectuels de gauche, qui seraient les consommateurs de drogue et ses
propagandistes.
C’est cacher l’essentiel, en plus
d’être ridicule. La consommation de drogue est depuis longtemps un phénomène
massif dans l’ensemble de la société et, avant tout, dans les classes
populaires, comme l’était et le reste la consommation d’alcool. Il y a encore à
ce jour beaucoup plus de décès, crimes, victimes en tout genre de l’alcoolisme
que de la consommation et du trafic de cannabis. La différence est que le
trafic de drogue est illégal, alors que l’industrie de l’alcool est un des
fleurons de l’économie nationale, tenu en main par quelques familles
bourgeoises influentes.
L’État décidera peut-être un
jour, à l’exemple de nombreux pays, de légaliser le cannabis. Cela, au moins,
ruinerait les dealers de quartiers, mettrait fin à leurs fusillades et leur
arrogance et soulagerait un peu la vie des cités populaires. Mais cela
déplacerait sûrement le trafic vers d’autres produits et surtout ne réglerait
aucunement la question de fond : comment vivre dans un monde qui n’a que
des paradis artificiels à proposer à des dizaines de millions d’opprimés ?
Paul GALOIS (Lutte ouvrière
n°2866)