Zemmour :
un étalage fétide
20 Octobre 2021
À la recherche d’une insanité
politique quotidienne pour assurer un écho à sa campagne pré-présidentielle,
Éric Zemmour a pris la défense de Maurice Papon, responsable de la déportation
des Juifs de Bordeaux sous Pétain et massacreur d’Algériens à Paris sous De
Gaulle.
Zemmour trace son sillon en
réhabilitant et glorifiant le passé réactionnaire, esclavagiste, colonialiste,
antisémite et patriarcal de la France. Et il y a de la matière première !
Reprenant le terrain longtemps labouré par Jean-Marie Le Pen, abandonné par sa
fille en quête de dédiabolisation, Zemmour y a trouvé un public pour applaudir
sa vision fantasmée de la grandeur perdue de la France mais aussi ses délires
xénophobes et sa haine des musulmans. Sous prétexte de promouvoir son livre, il
remplit ses salles de meeting tandis que, selon les sondages, qui affolent les
autres candidats, avant même qu’il ne se déclare, il pourrait obtenir 16 à
17 % des voix et devancer Marine Le Pen.
Comme la famille Le Pen avant
lui, Zemmour prospère sur la crise économique, les inquiétudes qu’elle suscite,
la crainte du chômage et du déclassement qui menace des couches sociales
longtemps protégées. Pour faire oublier la responsabilité des capitalistes, à
commencer par les patrons français, il rend les étrangers, les immigrés ou
leurs descendants, responsables du chômage, du manque de logements, des bas
salaires et de tous les malheurs qui frappent les classes populaires. S’il a un
écho, c’est qu’il trouve un terrain déjà bien préparé par Sarkozy, Hollande et
Macron, qui chacun à son tour, au sommet de l’État, ont lancé des campagnes
sécuritaires, refoulé les migrants, stigmatisé la jeunesse des banlieues ou
inventé un prétendu séparatisme des musulmans.
Le succès de Zemmour ne doit pas
grand-chose à ses talents personnels mais beaucoup à ses relais médiatiques et
à ses soutiens financiers. Le milliardaire Vincent Bolloré, propriétaire de
CNews, de Canal+, de journaux et de maisons d’édition, lui a offert une
émission quotidienne alors même qu’il a été plusieurs fois condamné pour ses
propos racistes. Zemmour est aussi soutenu par le riche financier Charles Gave,
lui-même identitaire. Il s’est entouré d’un préfet en retraite, de jeunes
banquiers, d’une énarque arriviste, pour organiser sa campagne. Tout ce monde espère
visiblement refaire l’opération qui a porté Macron au pouvoir en 2017, cette
fois-ci à l’extrême droite, et en s’adressant à une fraction de la bourgeoisie
française, à une frange réactionnaire et nostalgique du temps béni des
colonies, qui rêverait de propulser un Zemmour à l’Élysée.
Comme la famille Le Pen avant lui
et pour tenter d’obtenir le vote des milieux populaires, Zemmour pose au
candidat antisystème qui refuse le politiquement correct et dénonce les élites.
C’est une imposture. C’est surtout un piège mortel pour les travailleurs qui le
croiraient. Non seulement Zemmour sème le poison de la division en voulant
dresser les travailleurs prétendument français de souche contre tous les
autres, mais son programme est ouvertement antiouvrier. On peut l’entendre
déclarer que « la France ne travaille pas assez » et que « promettre
une augmentation du smic est démagogique ». Ce triste sire annonce la
couleur : les coups contre les travailleurs.
Xavier
LACHAU (Lutte ouvrière n°2777)