Cisjordanie
: l’armée et les colons contre les Palestiniens
20 Décembre 2023
Depuis deux mois, en Cisjordanie,
plus de 300 Palestiniens ont été tués par les forces officielles de répression
israéliennes et les colons.
« Tous les Palestiniens sont
regardés par les Israéliens comme s’ils étaient ceux qui ont perpétré les
massacres du Hamas », constate un militant palestinien des droits
humains. En effet, pendant que la ministre française des Affaires étrangères
déclare que son gouvernement « a décidé de prendre des mesures à titre
national contre certains colons israéliens extrémistes », leurs
exactions se multiplient. L’écrasement des Gazaouis sous les bombes
s’accompagne de raids militaires et d’attaques de milices de colons d’extrême
droite armés contre des villages et des camps de réfugiés où vivent une partie
des trois millions d’Arabes de Cisjordanie.
En quelques jours, dans la
première quinzaine de décembre, l’armée a à nouveau organisé des raids
meurtriers dans les camps de réfugiés, où vivent des familles palestiniennes
chassées de leurs terres depuis 1948. À Jénine, sous prétexte d’avoir trouvé
des tunnels – et alors ? – les soldats ont tué douze jeunes, blindés et
bulldozers ont saccagé des maisons, des échoppes, écrasé des voitures. Dans le
camp de Tulkarem, cinq Palestiniens ont été tués et quatre autres dans celui de
Faraa à Tubas.
Pour faire entendre leur colère
et leur désespoir, le 11 décembre, les habitants des villes de Cisjordanie et
ceux de Jérusalem-Est étaient appelés par les organisations palestiniennes à
une grève générale. Par l’arrêt des activités quotidiennes, ils voulaient
marquer leur opposition au soutien des dirigeants des États-Unis à la politique
meurtrière de Netanyahou et à l’écrasement programmé de Gaza, réexprimé par
leur veto à l’ONU.
La grève s’est traduite un peu
partout par des boutiques closes, des rues vides mais, à Ramallah, une
manifestation nombreuse, hérissée de drapeaux du Fatah, du FDLP et du Hamas, a
fait entendre la colère de Palestiniens de tous âges, dont beaucoup de jeunes,
femmes et hommes. Des pancartes en anglais « Stop genocide »
exprimaient clairement la condamnation du massacre à Gaza. Au-delà des
frontières, au Liban, en Jordanie, la population avait aussi été appelée à
cesser toute activité.
En Cisjordanie même, cette
journée de grève n’était qu’un moment de plus dans les manifestations de
colère. Les rassemblements, spontanés ou non, les réactions collectives contre
les exactions de l’armée israélienne et des colons se multiplient. Les manifestations
de groupes de jeunes, armés de cailloux, ont aussi servi de prétexte à des
réactions meurtrières de l’armée israélienne ou de groupes de colons, quand
elles n’avaient pas été auparavant dispersées sans ménagement par la police de
l’Autorité palestinienne.
130 000 travailleurs
palestiniens ont été réduits au chômage suite à la suppression de leur permis
de travail par le gouvernement d’Israël. Contrairement aux Israéliens, ils
n’ont droit à aucune allocation chômage, et l’Autorité palestinienne n’en
distribue pas non plus. « Nous avons dépensé ce que nous avons
gagné », dit un ouvrier du bâtiment renvoyé chez lui. Comme lui,
70 % des travailleurs de sa ville, qui auparavant traversaient chaque jour
la frontière après d’éprouvantes attentes aux postes de contrôle, sont sans
ressources.
La pauvreté s’installe dans la
population travailleuse sur fond d’une guerre de plus en plus ouverte. Le
déploiement de plus de 700 000 colons et leur violence encouragée par la
politique agressive du gouvernement israélien, a déjà rayé de la carte seize
villages palestiniens. Face à un État qui continue à leur nier le droit à une
existence nationale, beaucoup craignent de se voir à nouveau chassés, comme
lors de la création d’Israël en 1948.
Viviane
LAFONT (Lutte ouvrière n°2890)