Électricité
: les folies du marché
07 Septembre 2022
Les prix de l’électricité sur les
marchés de gros européens sont devenus astronomiques : autour de 1 000 euros le
mégawattheure, et même plus, contre 85 l’an dernier. Mais les prix sont en
train de déraper bien au-delà parce que le cours du gaz s’envole.
Par décision des dirigeants
européens, ils ont été fixés sur le cours du gaz, pour permettre aux
capitalistes de l’énergie de prospérer, de façon que la moins performante des
centrales au gaz soit rentable.
Cela va peut-être changer puisque
le chancelier autrichien appelle l’Union européenne « à découpler le
prix de l’électricité de celui du gaz… pour arrêter cette folie ». La
présidente de la Commission européenne parle « des limites du
fonctionnement du marché ». Le chancelier allemand Olaf Scholz déclare
que le système actuel « ne peut être décrit comme fonctionnel s’il conduit
à des prix aussi élevés », etc. Une réunion est prévue le 9 septembre
à l’échelle européenne. Que va-t-il en résulter ? Pour le moment, mystère.
Mais ce n’est pas la seule « folie ».
En France, à la différence des autres pays, c’est le nucléaire qui domine et
c’est une entreprise d’État qui le gère par le biais d’EDF. Cette particularité
a conduit l’UE à obtenir l’ouverture du marché à des concurrents… qui
n’existaient pas. Il a fallu en trouver. La plupart sont fictifs et ne
produisent pas le moindre KWh, se contentant d’acheter du courant en gros à EDF
pour le revendre au détail aux consommateurs un tout petit peu moins cher. Ces
fournisseurs « alternatifs » sont plus de quarante en tout. De
gros trusts se sont mis sur les rangs de cette activité, dont Engie
(ex-GDF-Suez, qui bénéficie des centrales hydroélectriques de la Compagnie
nationale du Rhône qui lui ont été bradées), Total (qui, outre le pétrole et le
gaz, a acheté des sociétés d’électricité) et l’italien ENI, qui cherche à
s’implanter en France.
Autre « folie »,
il a été imposé à EDF de vendre à bas prix aux « alternatifs »
le quart de sa production nucléaire, soit 100 Térawattheures, système dit de
l’Arenh. Ces 100 TWh ne suffisant pas, le chiffre a été porté à 120 TWh, alors
que la production nucléaire recule, mais cela ne suffit encore pas ! Du
coup, pour honorer les contrats, les « alternatifs » doivent
compléter ce qui leur manque en achetant sur le marché de gros. Et alors là, vu
les tarifs, c’est la catastrophe ! Certains ferment donc boutique,
demandent à leurs clients de se reporter sur EDF, refusent de nouveaux clients,
etc.
On peut se demander pourquoi les
autorités maintiennent cette aberration des pseudo-producteurs alternatifs. En
réalité il s’agit de favoriser les gros trusts qui en profitent.
Comme EDF manque de courant à
cause de l’arrêt de certaines centrales tout en devant maintenant brader le
tiers de sa production aux alternatifs, elle doit acheter aussi sur le marché
de gros. Ce marché ne concernerait pas les particuliers, bénéficiant des prix
réglementés et de la limitation des tarifs par l’État, mais les fournisseurs
(dont EDF) et certains industriels. Ainsi EDF achète une partie de son
électricité au prix de gros alors qu’elle en revend à bas prix aux alternatifs,
en y perdant évidemment. Cela ne concerne pas les particuliers dit-on ?
Erreur car EDF va tôt ou tard majorer ses prix pour se rattraper et l’État
cessera de limiter les tarifs. Et on annonce déjà, pour des dates
indéterminées, une augmentation des prix de l’électricité (et du gaz, bien
sûr !)
Alors cette folie du marché
s’exerce au détriment de la population, mais pour le bénéfice des capitalistes
de l’énergie.
André VICTOR (Lutte ouvrière
n°2823)
PSA
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