mercredi 20 mars 2019

Algérie : Les femmes massivement mobilisées. Un article du dernier numéro de notre hebdomadaire Lutte ouvrière


Algérie : Les femmes massivement mobilisées

Dans le mouvement populaire qui secoue l’Algérie, les femmes sont de plus en plus présentes et leur participation est un énorme renfort. Cela a été particulièrement visible le vendredi 8 mars, notamment à Alger qui a vu la manifestation la plus importante, rassemblant des centaines de milliers de personnes.
Ce 8 mars était l’acte III, troisième vendredi consécutif de mobilisation contre le 5e mandat du candidat-président Bouteflika, mais il coïncidait aussi avec cette journée. Alors que le pouvoir avait fait cette journée une fête officielle, les femmes algériennes se sont réapproprié leur combat en l’exprimant cette fois dans la rue, bien plus nombreuses que lors des deux grandes mobilisations précédentes des 22 février et 2 mars.

Un 8 mars pas comme les autres

Toutes les générations ont défilé côte à côte : mères de famille, étudiantes et lycéennes, déjà dans la rue les deux mardis précédents, travailleuses, chômeuses, femmes âgées, certaines même en fauteuil roulant. Des femmes voilées ou non, d’autres en haïk (voile blanc traditionnel autour du corps), toutes affichaient leur joie, leur fierté et leur détermination. Les manifestations très populaires avaient un caractère familial et débonnaire, avec une ambiance dans les rues complètement changée. Les participants étaient prévenants, soucieux et respectueux les uns des autres. À la place des habituelles remarques sexistes, des regards déplacés, des attouchements subis par les femmes, il y avait une fraternité et une solidarité inédites !
Tout cela marquait un grand changement ! D’habitude en effet, le 8 mars ressemble plus à une sorte de fête des mères, lors de laquelle des festivités bien encadrées sont organisées en l’honneur des femmes, auxquelles il est de bon ton d’offrir des roses et de souhaiter bonne fête. Elles ont droit à la condescendance du pouvoir, qui leur octroie même une demi-journée de congé mais pas le droit de manifester. Bien des associations féminines et culturelles organisent malgré tout des rencontres, des rétrospectives, afin de célébrer les luttes des femmes, mais elles n’ont pas le droit à des actions de rue.
Les derniers rassemblements d’importance remontent à 2015, après l’assassinat de Razirka Chrif à Msila, une jeune femme écrasée délibérément par un automobiliste parce qu’elle avait refusé ses avances. L’émotion et la mobilisation dans le pays avaient accéléré l’adoption de la loi sur les violences faites aux femmes. C’était la première fois qu’une loi spécifique criminalisait ces violences. Cependant, afin de ménager les islamistes, les autorités avaient concédé une clause révoltante sur le « pardon », rendant ainsi possible l’impunité dans certaines situations.

Des revendications politiques et sociales

Dans le contexte du mouvement de contestation, l’affluence des femmes dans les manifestations était d’autant plus marquante. Les pancartes, les banderoles témoignaient de leur souci de lier le combat en cours à la lutte pour l’émancipation des femmes : « 8 mars de lutte et de combat. Les femmes s’engagent, système dégage », « On n’est pas consentant(e)s, arrêtez le viol », « Je ne vais pas faire la vaisselle, je fais la révolution », « Ne me libère pas, je m’en charge », « March like a girl ». Des femmes de l’association Djazairouna : pour la vérité, pour la justice, pour la mémoire, brandissaient des photos de femmes assassinées pendant la décennie noire. Les femmes interrogées par les journalistes témoignaient aussi de leur inquiétude pour l’avenir de leurs enfants, entre chômage, drogues ou harragas (ceux qui tentent la traversée de la Méditerranée). Une femme interviewée par le journal El Watan disait vouloir « une meilleure vie pour notre jeunesse. Je pense aux jeunes qui sont mangés par les poissons (harragas). Nos dirigeants mangent du poisson et nos enfants servent de chair à poissons ».
Une des préoccupations essentielles des femmes algériennes reste de pouvoir circuler librement, sans avoir à subir le harcèlement de rue. De même, elles continuent le combat contre le Code de la famille qui, malgré quelques amendements apportés en 2005, conserve toujours les mêmes dispositions inégalitaires sur les conditions du mariage, la polygamie, les dispositions sur le divorce, le lien paternel de filiation et l’héritage. Et bien sûr, comme partout dans le monde, les femmes qui travaillent sont aussi les plus exploitées, souvent réduites à des emplois précaires et mal rémunérés.
Fortes de leur participation massive aux manifestations contre le 5e mandat, bien des femmes d’Algérie sont déterminées à poursuivre le combat pour leur émancipation sociale et politique. Des travailleurs algériens continuent sans doute de reprendre à leur compte les propos assénés pendant des années par les islamistes sur les « voleuses d’emploi » ou celles « qui veulent quatre maris ». Cela n’est pas surprenant. Mais ce mouvement de contestation où les femmes se retrouvent en nombre, dans lequel un climat tout nouveau émerge, crée justement des conditions où ces préjugés peuvent être dépassés. Comme le proclamait une pancarte : « Femmes et hommes, unissons-nous dans la lutte, main dans la main, pour en finir avec l’exploitation ».

                                         Maud NATHAN (Lutte ouvrière n°2641)



Lutte ouvrière dans les élections européennes (5) La suite de l’article de notre revue Lutte de classe de mars-avril 2019


Lutte ouvrière dans les élections européennes (4) La suite de l’article de notre revue Lutte de classe de mars-avril 2019 sur papier ((2,5 euros) ou :


Unité de la lutte sous la direction de la classe ouvrière

Dans sa phase montante, le mouvement des gilets jaunes, recrutant en majorité dans les couches les plus écrasées du monde du travail, a entraîné en même temps d’autres catégories populaires: des professions libérales, des paysans ou des artisans parfois, des éléments de la vaste catégorie des «entrepreneurs» qui nexploitent personne, voire jusqu’à des petits patrons.
L’unité du mouvement invoquée de bonne foi par nombre de gilets jaunes n’est pas du tout contradictoire avec l’affirmation par les travailleurs de leurs revendications et de leurs perspectives de classe. Au contraire.
Si les travailleurs ne défendent pas leurs intérêts de classe, s’ils n’affirment pas leur propre politique, la contestation ne peut aboutir dans le meilleur des cas qu’à répondre partiellement aux revendications des catégories petites-bourgeoises.
Au contraire, en affirmant une politique de classe, la perspective des travailleurs doit être, tout en défendant leur propre peau, d’offrir également une politique aux autres catégories populaires.
Au-delà des travailleurs salariés, les petits paysans, les artisans, voire certains petits patrons, qui fournissent les grandes enseignes de la distribution, trouveraient leur intérêt à s’associer dans le contrôle des entreprises capitalistes. Le contrôle des chaînes commerciales démontrerait que, si les prix à la consommation sont en hausse alors que les revenus de ces fournisseurs sont en baisse, c’est qu’entre les deux s’intercale le profit capitaliste, celui des chaînes de distribution mais aussi celui des banques.
Ne pas laisser le contrôle des banques au grand capital est la seule façon de mettre fin à l’utilisation du crédit au profit de la grande bourgeoisie parasite. C’est la seule voie pour offrir aux petits paysans, aux artisans et à une multitude d’autres catégories petites-bourgeoises des conditions de crédit plus favorables, c’est-à-dire des prêts indispensables pour exercer leur métier d’agriculteur, d’artisan, d’entrepreneur indépendant, etc., sans générer de profit pour la finance capitaliste.
La population laborieuse mobilisée pour ce contrôle serait tout naturellement amenée à la nécessité d’exproprier les banques et les établissements financiers privés, de les regrouper dans une banque étatisée unique, placée sous le contrôle des travailleurs.
Tout cela semble aujourd’hui lointain et donc abstrait. Mais si le mouvement des gilets jaunes montre quelque chose, certes à une petite échelle et dans d’étroites limites, c’est avec quelle rapidité les choses peuvent changer dès lors que se mettent en mouvement les classes populaires aujourd’hui résignées.
En un certain sens, les gilets jaunes ont soulevé aussi la question du parti. Leur mouvement l’a fait surtout par la négative. L’hostilité envers les partis institutionnalisés a été la marque de fabrique du mouvement en ses débuts (là, il ne s’agit pas de l’activisme des militants du Rassemblement national (ex-FN) et assimilés ou des mélenchonistes, dissimulés derrière l’apolitisme). Mais le mouvement lui-même se pose la question de se structurer en vue, notamment, des élections européennes.
La discussion autour de cette aspiration, confuse, contradictoire, nous facilite les choses pour affirmer que, oui, il ne suffit pas de rejeter les partis de la bourgeoisie, il faut un parti pour les exploités, pour les pauvres. Il faut expliquer aussi qu’il faut que le parti des exploités sache quelle classe sociale est l’ennemie des exploités, quels sont les amis ou les alliés possibles. Le parti communiste révolutionnaire ne peut se constituer qu’autour d’un objectif partagé, autour d’un programme.
Avec la crise, dans cette situation où la bourgeoisie est à l’offensive pour reprendre des droits aux travailleurs, toute revendication sérieuse venant des salariés fera l’objet d’une lutte âpre et difficile. Et, lorsque les travailleurs se battront vraiment pour leurs intérêts de classe, ils feront leur expérience et réaliseront que, tant que la bourgeoisie tient les rênes des grands groupes industriels et financiers, elle les baladera, et que le seul moyen d’avancer réellement, c’est de contrôler ce qui se passe dans les entreprises. C’est de savoir quelles sont réellement les marges bénéficiaires et où passent les profits, combien sont investis, combien sont versés aux actionnaires…
Et la question du pouvoir et de l’expropriation de la bourgeoisie se posera, comme elle s’est déjà posée lors des grandes luttes sociales. C’est alors que «la classe ouvrière prendra conscience de cette vérité que, si elle veut vivre, le capitalisme doit mourir», pour reprendre une expression du Parti au temps où il était communiste.
La lutte pour les revendications quotidiennes immédiates et la lutte pour l’émancipation totale des travailleurs ne doivent faire qu’un seul et même combat. Eh bien, il faut que, dès aujourd’hui, les travailleurs les plus combatifs s’en convainquent: militer pour les intérêts des travailleurs, cest militer pour la révolution sociale!
                 (A suivre)



Argenteuil, crèches remises à un délégataire : "reprise avec CDI et sans baisse de salaire"…





Reprise avec CDI et sans baisse de salaire…



 
Aucune raison que le loup mange sa galette


L’adjoint en charge des crèches, Philippe Métezeau a fait la réponse suivante à notre brève d’hier sur le sujet : « Bonjour.
il est difficile de vous répondre précisément, ne connaissant pas l’identité de la personne. Cette déclaration est d’autant plus surprenante que les entretiens individuels n’ont pas commencé. Je peux néanmoins vous préciser qu’il est bien prévu au cahier des charges accepté par le nouveau gestionnaire que les CDD deviennent CDI, avec reprise du personnel à un salaire identique à celui perçu aujourd’hui. »
.
         Nous le remercions d’avoir pris la peine de nous répondre. Et nous espérons que les éléments qu’il nous donne seront de nature à aider à la solution de l'inquiétude que nous exprimions. DM

Argenteuil, Comité Jean Vilar : plusieurs de ses membres étaient sur place


Question Eau, du champagne ? Quant à la Lumière…

 
A des années Lumière de "Cap Héloïse"

Des amies et amis du Comité Jean Vilar sont allés au cloître des Bernardins hier au soir au quartier Latin où se tenait une sauterie à propos de l’Impressionnisme, autour de l’association Eau et Lumière chargée de promouvoir ce courant pictural qui est marqué par les méandres de la Seine.
         Question méandre, l’édile d’Argenteuil était présent en compagnie de quelques proches, des élus comme lui, et le géant de culture picturale qu’est le président de du Conseil Economique d’Argenteuil qui ne nous a toujours pas dit ce qu’il pensait du projet « Cap Héloïse ».
         En tout cas, bravo aux membres du Comité Jean Vilar qui avaient pu faire le déplacement et qui ont pu dire à un certain nombre d’invités ce qu’il en était sur Argenteuil, et de l’écart entre la promotion des vantards et leur action dans la réalité pour aider à la culture et à la promotion de l’Impressionnisme.
         Mais s’ils nous racontent (nos amis du Comité), nous en rajouterons sur le sujet, et en attendant, nous leur répéterons sans cesse « bravo ». DM

Argenteuil. Enquête publique environnementale « Cap Héloïse ». Ma contribution


Supprimera-t-on ou pas ce site remarquable ? Telle est la question fondamentale.

La liste est longue des aspects négatifs du projet « Cap Héloïse » sur tous les plans de l’environnement, c’est-à-dire de la vie sociale. Commerce, vie quotidienne de quartier, culture, circulation, protection civile, et bien d’autres domaines sont concernés en soi par cette implantation dans un lieu particulier tellement connoté. Mais ce projet présente un enjeu bien plus fondamental sur un point que je voudrais aborder dans cette présente contribution à l’enquête publique qui a lui actuellement. L’enjeu de la fin ou pas de toute une histoire spatiale, le début de l’éradication d’un site, et d’un site tout à fait original, rarissime dans la géographie urbaine de la région parisienne, celui d’une ville séparée du fleuve par une large bande d’espace non urbanisé, une sorte d’avant-scène.

         Le bourg d’Argenteuil s’est établi historiquement au bord du fleuve à la limite d’une grande cuvette cultivée, en bas de collines, qui délimita son terroir. Face directement à sa rive urbanisée de rive droite de la Seine, il y eut longtemps une île (il faudrait réfléchir aux avantages que cette localisation procura). Ce n’est pas banal.
         Le bras de Seine séparant la rive de l’île fut comblé dans la première partie du XIXème siècle. Cela offrit comme une avancée verte à ce bourg de bord de fleuve, qui ne fut pas lotie. Autre originalité.
         Fondamentalement, cet espace est resté le même deux siècles plus tard, de la sous-préfecture au « pont de l’usine à eau ». Certes, quelques installations de faible emprise verticale furent successivement établies : D311 et carrefours afférents entre berge et ville, installations sportives du stade Henri Barbusse à la salle Mimoun et au terrain de football, salle des fêtes Jean Vilar et son parking, marché couvert, Parc des berges. Mais fondamentalement, et même avec la D311, ces aménagements n’ont pas détruit jusqu’à ce jour le site. La commune d’Argenteuil conserve toujours son avancée « naturée » qui nécessiterait bien des transformations, mais qui demeure encore.
         Et c’est ce site géographique remarquable dont le projet « cap Héloïse », s’il aboutissait, engagerait la destruction. On peut améliorer demain l’impact de toutes les installations actuelles. On pourrait facilement transformer la quatre-voies en une deux voies de circulation douce, ce qui permettrait de retrouver des berges et de les relier à l’hinterland. Mais on ne pourra effacer la masse prévue par « Cap Héloïse » qui pourra n’être plus alors que la première étape de la fin du massacre. Il n’y a que le premier pas qui coûte.
         Dans cette question où se joue la suppression de l’« avant-scène » communale de « L’île vers les berges du fleuve », il y a donc un enjeu environnement fondamental : veut-on mettre fin à une organisation spatiale historique qui présente de si nombreuses ressources, ou passer à une deuxième phase de « bétonisation » malheureuse du centre-ville, après celle des années 1960 qui eut bien d’autres justifications ?    Telle est la question qui, par ailleurs, de cette façon ou d’une autre, n’a jamais été posée à la population que l’on a mise, bien au contraire, devant le fait accompli.

Ce n’est pas un hasard si ce site d’« avant-Seine » a été peint par de grands maîtres de l’Impressionnisme. Monet et Sisley ne furent pas seulement attirés par la proximité d’un site entre berge et bourg qu’ils pouvaient également retrouver à Bougival ou Louveciennes. Ils n’avaient pas seulement la proximité de Paris. Mais ils avaient un site tout à fait original, marquée par la Ville et la nature, en l’occurrence par le bourg et une avant-scène, L’île, entre bourg et fleuve.
Et le boulevard Héloïse d’aujourd’hui, comme élément de liaison entre ce site et le bourg.
                                               Dominique MARIETTE


Claude Monet

Sisley