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lundi 11 mars 2024

Argenteuil, Rino Della Negra n’est certainement pas mort pour « La France » éternelle… qui n’existe pas

« Enfin, j’embrasse tout Argenteuil, du commencement à la fin » (dernière lettre à ses parents)

 

 

Le numéro de mars du magazine municipal Ma ville qui vient de paraître revient sur Rino Della Negra, dans un article où quelques erreurs fourmillent, et dans l’éditorial du maire d’Argenteuil. Celui-ci reprend le thème de l’instrumentalisation habituelle des défenseurs de l’ordre social tel qu’il est, celui de l’unité de la population, au-delà des classes, celle de la « France » éternelle : « Il est le symbole d’une jeunesse qui s’engage pour ses idées, pour la France, qui prend des risques et qui marque l’histoire ». Cette antienne que les monuments aux morts du pays ont diffusée depuis les années 1920 à part quelques exceptions (l’illustration ci-dessus de celui de Gentioux dans la Creuse), celle que les millions de morts d’ici des guerres du XXème siècle sont « Morts pour la France » !

         Rino Della Negra et ses camarades du réseau Manouchian, morts pour la France comme on l’a fait dire pour tous les poilus de 14-18 ?

         En tout cas, pour Rino, nulle trace de cela dans ses deux dernières lettres. Alors pourquoi s’est-il engagé dans l’action dans un réseau bien particulier au-delà de son refus du STO ?

         Pour être avec ses potes de « Maze » ? Contre l’Occupation ? Contre l’antifascisme de son milieu proche lié à la Guerre d’Espagne, au Parti Communiste Italien, au PCF, et à l’engagement dans les Brigades internationales ? Pour d’autres lendemains de guerre ? On ne le saura précisément jamais.

         Mais que l’on ne nous raconte pas des histoires. La municipalité vient de découvrir l’engagement dans l’action de ces immigrés nos frères, du fils d’immigré Rino, soit. Pour le reste, il s’agit de l’instrumentalisation bien connue qui prépare la jeunesse à marcher au pas en vue de la prochaine guerre.

         Ces deux dernières années, j’ai fait deux « Ateliers d’histoire » MJC-Sous les couvertures avec un des deux auteurs du livre « Rino Della Negra footballeur et partisan », Dimitri Manessis, (éditions Libertalia). Je suis bien sûr à la disposition du Conseil Municipal des Jeunes vanté par le maire d’Argenteuil pour l’organisation d’une nouvelle soirée avec l’historien, avec la présence de l’édile comme de bien entendu. DM

 

lundi 13 novembre 2023

“L’Amérique face à l’holocauste”: ce que fut la politique des États-Unis face aux persécutions antijuives des nazis. Un article de notre hebdomadaire Lutte ouvrière

“L’Amérique face à l’holocauste”: ce que fut la politique des États-Unis face aux persécutions antijuives des nazis

08 Novembre 2023

Les 17 et 18 octobre, Arte diffusait un documentaire de six heures : L’Amérique face à l’Holocauste, version française de The US and the Holocaust (2022, 2023) de l’auteur Geoffrey C. Ward et des réalisateurs Ken Burns, Lynn Novick et Sarah Borstein.

Au moment où les dirigeants américains se présentent comme de grands combattants contre les persécutions antijuives, cette série est un rappel utile. Elle montre quelle fut la politique des États-Unis, sous Roosevelt, vis-à-vis des persécutions subies par les Juifs d’Allemagne, puis d’autres pays européens, politique qui fut définie comme « les bras fermés de l’Amérique ».

L’arrivée de Hitler au pouvoir en janvier 1933 posa immédiatement pour la population juive la question : pouvait-on échapper à l’antisémitisme officiel du régime, traduit tout de suite en mesures restrictives pour les Juifs dans divers domaines, en fuyant à l’étranger ? Ces mesures s’accompagnaient de nombreuses violences dont le point d’orgue fut la « Nuit de cristal » des 9 et 10 novembre 1938. Les destructions de synagogues, d’appartements, d’entreprises juives étaient accompagnées de l’internement de milliers de Juifs dans des camps pour des périodes variables, avant d’en arriver plus tard à la politique d’extermination.

Une conférence internationale sur la crise des réfugiés fut réunie à Évian en juillet 1938, à l’appel du président Franklin Roosevelt, avec des représentants de 32 pays. La quasi-totalité, les USA inclus, refusèrent de modifier leurs lois d’immigration pour accueillir les réfugiés Juifs. Les tenants de la politique de Roosevelt invoquaient notamment le contexte existant aux États-Unis pour justifier leur passivité, avec le problème du chômage de masse, qui avait explosé à partir de 1932 au travers de la Grande Dépression, puis s’était réduit mais sévissait à nouveau.

Mais les mêmes invoquaient aussi l’hostilité marquée d’une majorité de la population américaine à l’accueil de nouveaux immigrants, dans l’esprit des lois de 1924 qui avaient interdit toute immigration d’Asie et institué des quotas, d’autant plus faibles qu’ils concernaient les populations les plus à l’Est de l’Europe ! Cette hostilité était de plus ouvertement exprimée par des personnalités antisémites comme Henry Ford, le magnat de l’automobile, ou le prêtre Coughlin qui, dans des émissions de radio, accusait les Juifs de manipuler les institutions financières et de conspirer pour contrôler le monde.

Tout cela se déroulait dans un pays où la ségrégation envers les Noirs se perpétuait. L’administration américaine mit en place ou appliqua rigoureusement les obstacles à l’accueil de réfugiés prévus dans les lois sur l’immigration, qui exigeaient de la part des demandeurs des lettres de recommandation, des visas de sortie et de transit, ainsi que le versement de milliers de dollars. À la mi-1938, près de 140 000 Allemands et Autrichiens, la plupart juifs, avaient déposé des demandes de visa américain. Durant l’année, ce nombre atteignit 300 000, créant une liste d’attente pour onze ans.

Un autre drame survint lorsque, en mai 1939, le navire M.S. St Louis, transportant 937 passagers, pour la plupart des Juifs de Hambourg, vers La Havane, ne put en laisser débarquer que vingt-huit à son arrivée à Cuba. S’étant alors dirigé vers Miami, il fut repoussé selon les dispositions des lois américaines sur l’immigration et contraint de regagner l’Europe, où beaucoup de passagers allaient périr dans les camps.

Un article du New York Times du 2 septembre 2022 se lit comme une condamnation de la politique américaine envers les victimes du régime hitlérien : « Même après la fin de la guerre, alors que les actualités cinématographiques avaient montré les libérateurs américains stupéfaits par la vision des cadavres ambulants et des empilements de corps, les antisémites du Département d’État et du Congrès continuèrent de résister. Résultat : des dizaines de milliers de survivants juifs restèrent entassés jusqu’en 1950 dans des camps sommaires de personnes déplacées, alors que des collaborateurs des nazis en Ukraine, Lituanie, Estonie et Lettonie étaient laissés libres parce que considérés comme de solides anticommunistes. »

                                             Jean MASSARDIER (Lutte ouvrière n°2884)

 

Achetez, lisez Lutte ouvrière. Il contient de nombreux articles sur la situation au Proche-Orient. Ce sont des articles dont la lecture est particulièrement nécessaire actuellement.

 

Les prochaines permanences prévues :

-Aujourd’hui lundi 13 novembre, de 18 h. à 19 h. centre commercial des Raguenets ;

-Mercredi 15 novembre, de 11 h.30 à midi marché des Champioux.

Toutes les semaines, l’hebdomadaire Lutte ouvrière est aussi en vente à la librairie Le Presse-papier et au Tabac-Presse du mail de la Terrasse du quartier du Val-Nord que nous remercions.

 

lundi 15 mai 2023

Le CNR : derrière le mythe, une opération politique

Le CNR : derrière le mythe, une opération politique

10 Mai 2023

À l’occasion de l’hommage de Macron à Jean Moulin, le 8 mai à Lyon, la CGT a tenu à placer la manifestation de protestation sous le signe de la défense de « l’héritage social de la Résistance ». Elle s’est revendiquée de Jean Moulin qui, selon elle, « a unifié toutes les résistances derrière le programme du CNR ».

Pour bien des organisations sociales, le Conseil national de la Résistance (CNR) serait la matrice de toutes les avancées des 80 dernières années, en particulier la Sécurité sociale et la retraite par répartition. Ambroise Croizat, ministre PCF du Travail et de la Sécurité sociale en 1945-1946, est célébré comme un héros de la classe ouvrière. Mais le CNR camouflait une opération politique.

En unifiant la Résistance, Jean Moulin, ex-préfet en mission pour de Gaulle, visait à réaliser derrière ce général réactionnaire l’union de tous les partis, de la droite jusqu’au PCF. L’objectif était de remettre en selle l’appareil d’État français, en s’émancipant le plus possible de la tutelle américaine et en évitant toute révolte sociale. Le programme du CNR, les « jours heureux », était l’habillage social de cette unité politique. Dans cette alliance, le PCF apportait son influence parmi les classes populaires et son réseau militant capable d’encadrer les travailleurs qui espéraient que leur vie change après la guerre. En échange, de Gaulle allait donner au PCF trois puis cinq ministères dans les gouvernements issus du CNR.

Le rôle du PCF et de la CGT entre 1944 et 1947 fut de promettre aux travailleurs des jours heureux lointains pour leur faire accepter les sacrifices immédiats, rationnement, travaux pénibles, et la remise en place de l’ordre social. Maurice Thorez, dirigeant du PCF et ministre d’État, fustigea « la grève, arme des trusts » et exhorta les mineurs de charbon à « produire, produire et encore produire » pour gagner la bataille de la production. À ceux qui n’avaient pas oublié le rôle de la police sous Pétain, à ceux qui entendaient maintenir des milices armées, il ordonna : « Une seule police, une seule armée ». La police de Macron et Darmanin qui éborgne aujourd’hui les manifestants est la lointaine héritière de la police pétainiste blanchie par le gouvernement issu du CNR.

L’État rebâti sous l’égide de de Gaulle et Thorez n’était en rien celui des travailleurs. À quelques exceptions près, les grands patrons qui avaient fait des affaires pendant l’occupation allemande conservèrent leurs usines. Les nationalisations tant vantées permirent la reconstruction et l’approvisionnement de leurs entreprises détruites. Même les concessions faites aux travailleurs, les assurances sociales et la retraite, profitaient aux patrons : construire un système collectif d’assurance maladie ou vieillesse leur permettait de maintenir les salaires au plus bas.

Symbole du fait que le gouverne­ment issu du CNR défen­dait coûte que coûte les intérêts de la bourgeoisie française : le 8 mai 1945, de Gaulle faisait bombarder et massacrer plusieurs dizaines de milliers d’Algériens à ­Sétif et Guelma parce qu’ils avaient osé se révolter contre l’ordre colonial. Les ministres du PCF et les chefs de la CGT apportèrent leur caution à ces massacres.

Taire cette histoire serait se préparer à livrer une nouvelle fois les travailleurs à leurs exploiteurs.

                                                    Xavier LACHAU (Lutte ouvrière n°2858)