dimanche 12 août 2018

Argenteuil, défense de Jean Vilar, une tribune libre dans le journal L’Humanité

                                                                

Le journal L’Humanité a fait paraître jeudi 9 août une tribune libre de membres du Comité Jean Vilar. N’ayant pu copier celle-ci sur le site du quotidien, je rapporte ci-dessous une de ses dernières moutures que j’avais archivée. Il ne doit pas y avoir de grande différence entre ce texte et celui qui a été publié jeudi. En tout cas, c’est bien volontiers que nous le faisons. DM
 
A Argenteuil :

La culture du béton contre l’Impressionnisme. 

« Notre pays cultive la passion du patrimoine, de l’histoire », disait Rostand, de l’Académie Française. Il faut croire que la majorité des élu·e·s municipaux  d’Argenteuil résiste à cette culture : pour cette municipalité et des promoteurs, la culture du béton l’emporte sur l’Impressionnisme.
Argenteuil avait été dotée d’une gare ferroviaire dès 1863, ce qui a permis son développement  industriel. Les ouvriers prenaient le train depuis Paris. Ils ont vite été suivis par les peintres impressionnistes : Monet à Argenteuil face à la gare, où sa maison est toujours debout, et Caillebotte à Gennevilliers de l’autre côté du pont, et leurs invités de Sisley à Renoir… ont fait la célébrité mondiale de la ville.
Argenteuil, lieu de loisirs pour les Parisiens, avec ses  nombreuses guinguettes, son ancienne île transformée en promenade, ses régates chères à Maupassant, ouvre le  premier port du Club du Cercle de la Voile de Paris. Gustave Caillebotte et son frère s’y inscrivent  en 1876.
C’est  à Argenteuil qu'a été créée l'association des peintres impressionnistes, le 27 décembre 1873. Argenteuil a aussi sa place dans l’histoire du cubisme : Georges Braque y est né en 1882. Et début 1907, Maurice de Vlaminck remarque dans un café d’Argenteuil, et achète au patron, trois figurines  africaines  qu’il cède ensuite à André Derain, qui les montre à Picasso : elles lui inspirent les « Demoiselles d’Avignon ».
Cette culture, ce patrimoine de paysages chers à Monet et à ses amis, sont mis en péril par un projet immobilier sur l’ancienne île d’Argenteuil, par ailleurs inondable. 
Alors que les plantations de l’île ont été récemment reconnues comme « ensemble arboré  remarquable » par l’association A.R.B.R.E.S, elles seraient abattues sur la surface du projet.
La salle des fêtes municipale Jean Vilar, inaugurée en 1971 sur cette même île et très chère aux Argenteuillais, accueille de multiples manifestations : un salon du livre des lecteurs, la foire des « Cinglés du cinéma », un salon numismatique… Elle serait détruite et remplacée par une salle de spectacles privée, que la Ville devrait louer ensuite au promoteur pour ses événements locaux.                                                                                                                                           

L’intérêt de l’opération pour le promoteur réside dans la construction de 156 logements… en zone inondable, sur les remblais de l’ancien bras de Seine. Il y ajouterait un centre commercial à 400 mètres de celui du centre ville, et un multiplexe à 400 mètres du cinéma municipal.
Ce multiplexe, tour sans fenêtres de 45 mètres, équivalent à 14 étages, serait le nouveau signal pour entrer dans la ville de Monet ?
Les Argenteuillais ne le voient pas ainsi.
Une association, le Comité Jean Vilar, s’est créée pour rejeter cette hérésie immobilière et proposer une alternative. Déjà 7000  Argenteuillais, fiers de l’histoire de leur ville, ont signé sa pétition. Ils souhaitent être soutenus dans leur  désir de protéger et de faire connaître leur patrimoine, leur bien commun qui est aussi celui du peuple français et de l’humanité.
La municipalité n’a pas donné suite aux demandes de référendum local, de concertation publique ou d’un simple rendez-vous.
« La culture, c’est le trésor accumulé des créations humaines », rappelait Louis Aragon en 1966. Argenteuil a trop apporté à ce trésor pour accepter qu’il soit ainsi méprisé.
                                                                    Comité Jean Vilar, Argenteuil

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