lundi 14 août 2017

Révolution russe de 1917 (10) : printemps 1917, la Révolution étend son influence


La révolution étend son influence et “ apprend tout en agissant ” 

Deux mois après la révolution de Février, les manifestations de Petrograd contre la continuation de la guerre entraînent la démission des ministres Goutchkov et Milioukov. Puis, du 14 au 22 avril (27 avril au 4 mai selon notre calendrier), les débats qui animent la 7e conférence du Parti bolchevik montrent que la révolution continue à s’étendre en surface comme en profondeur. Les travailleurs imposent la journée de huit heures, organisent le ravitaillement et créent leurs milices : un contrôle ouvrier se met en place.
Le mot d’ordre « tout le pouvoir au soviet » est déjà une réalité vivante. Un délégué de la région de Moscou décrit ainsi la situation : « À Orekhovo-Zonevo, le pouvoir est aux mains des ouvriers. Le port d’armes sans autorisation du soviet local est interdit. Les paysans sont solidaires des ouvriers… Nous avons dans notre bourgade une tourbière qui appartient à des capitalistes. Nous sommes allés les voir et nous leur avons dit que, s’ils ne nous donnaient pas du combustible pour travailler, nous fermerions la fabrique. Le camarade Lénine a dit tout à l’heure qu’il faut que le soviet des députés ouvriers prenne le pouvoir. Eh bien ! chez nous, c’est déjà fait. »
Dans le bassin du Donetz, les ouvriers sont aux commandes de la ville ukrainienne de Lougansk, comme le raconte leur délégué : « Les mineurs sont partout : dans les commissariats et la milice, dans les soviets de députés ouvriers et soldats. Ils exercent même les fonctions de juges. Ils sont les maîtres absolus des puits. »
Lénine tire ainsi les conclusions de cette réunion :
« Créer un réseau de soviets des députés ouvriers, soldats et paysans, telle est la tâche du jour. Toute la Russie se couvre déjà d’un réseau d’organes d’autonomie administrative locale. La “commune” peut elle aussi revêtir la forme d’organes d’autonomie administrative. La suppression de la police et de l’armée permanente, l’armement général du peuple, tout cela peut être réalisé par l’intermédiaire de ces organes. (…)
Une activité valable, c’est de réaliser l’abolition de l’armée permanente, du corps des fonctionnaires et de la police, ainsi que l’armement général du peuple. (…)
La guerre est devenue mondiale. Elle est faite par des classes déterminées et engendrée par le capital bancaire. Le passage du pouvoir à une autre classe peut seul y mettre un terme. La paix ne peut rien changer tant que les classes dirigeantes gardent le pouvoir.
Il faut indiquer au prolétariat les mesures concrètes susceptibles de faire progresser la révolution. Faire progresser la révolution, cela veut dire réaliser d’autorité l’autonomie administrative. L’extension de la démocratie ne fait pas obstacle à l’autonomie administrative et permet de réaliser nos tâches. On ne peut terminer la guerre que par le passage du pouvoir à une autre classe – ce dont la Russie est plus près que tout autre pays – et en aucun cas par une trêve entre les capitalistes de tous les pays moyennant un troc dont les peuples que l’on étrangle feraient les frais. La “commune” convient parfaitement au paysan. La “commune” signifie l’autonomie administrative locale la plus complète, l’absence de toute surveillance d’en haut. Les neuf dixièmes de la paysannerie doivent s’en montrer partisans.
La bourgeoisie peut se résigner à la nationalisation du sol si les paysans prennent la terre. En tant que parti prolétarien, nous devons dire que la terre à elle seule ne les nourrira pas. Il faudra donc qu’ils s’organisent pour la cultiver en commun. Nous devons être pour la centralisation, mais il est des moments où la tâche doit être exécutée sur le plan local, où nous devons admettre le maximum d’initiative sur place. Les cadets se comportent déjà en fonctionnaires. Ils disent au paysan : “Attends l’Assemblée constituante.” Notre parti est le seul à donner les mots d’ordre qui font réellement progresser la révolution. Les soviets des députés ouvriers sont parfaitement en mesure de créer partout des « communes ». La question est de savoir si le prolétariat a les capacités d’organisation nécessaires, mais c’est une chose qu’on ne saurait supputer d’avance, il faut apprendre tout en agissant. »

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